Et afin de mieux suivre la présentation, l’illustration qui, en tête du présent billet représente une commode, pourra être utile : chaque tiroir représente un type différent de mémoire – certaines sont les premières atteintes, d’autres résistent plus longtemps.
mercredi 31 juillet 2013
Alzheimer – h
Dans ce qui précède on a eu l’occasion – dans
un cas particulier – de dire comment l'Alzheimer se manifeste à ses débuts, et comment cela se traduit dans l'entourage de la personne qui en est atteinte.
Dans ce cas particulier, on retrouve bon
nombre de caractéristiques classiques :
Les
premiers symptômes sont des troubles de mémoire ; l’âge auquel ils
apparaissent tourne autour de 65 à 70 ans ; ils sont légèrement plus
fréquents chez les femmes (une estimation courante donne trois femmes pour deux
hommes) ; l’environnement (familial et fréquemment amical) des proches est
largement mis à contribution – dans la littérature sur le sujet, on les désigne
par les aidants et une réelle dynamique (parfois commerciale) s’est
mise en place pour aider les aidants…
Particulier quand même :
Dans la
mesure où, par exemple, Magali a reçu un bon
niveau d’instruction et a exercé de réelles responsabilités
professionnelles ; où, tout en étant célibataire – c’est-à-dire ne
bénéficiant pas du soutien d’un conjoint – elle a trouvé dans une fratrie qui
s’entend une diversité de points d’appui qui ne reposent pas sur le dos d’une
seule et même personne ; où, ayant développé dans sa vie adulte des
prédispositions sociales et culturelles qui s’étaient déjà manifestées dans des
mouvements de jeunesse, elle y a acquis un certain répondant pour faire face
aux difficultés ; où elle a su se constituer des réserves qui se révèlent
maintenant utiles pour ses années à venir…
Ce dernier billet fournit quelques éléments
complémentaires qui sortent du cadre de ce témoignage. La littérature est
particulièrement abondante à ce sujet. Dans ce qui suit, on ne prétend pas être exhaustif ni de
parler à la place des nombreuses personnes et institutions concernées :
les personnes directement touchées, celles qui les aident ou leur apportent des
soins, ou qui gèrent les actions entreprises à ce sujet… Ni d’indiquer ce qu’il
faut faire.
Le souci de préserver l’anonymat dans le cadre d’un
bloc-notes qui est publiquement accessible a pour contrepartie de ne pas pousser plus loin le détail. Celles et ceux qui ont
participé à la rédaction témoignent qu’ils ont rencontré tout du long des
personnes remarquables, non seulement
pour leurs qualités professionnelles mais clairement aussi dans leur capacité d’écoute
et leur dynamisme à faire évoluer des contextes où on est encore mal conscient des
progrès récents et des enjeux pour la suite.
Voici quelques coups de projecteurs – le choix
aurait plu être différent.
Le premier pourra sembler décalé par rapport à
notre propos et contribue pourtant à l’éclairer. S’y exprime une ingénieure en électronique, mariée à un homme extra
et l'heureuse maman de 3 enfants. Elle est atteinte d'une maladie apparentée
Alzheimer, et a été diagnostiquée il y a bientôt 3 ans. Le titre : J'en
fais des efforts pour me maintenir dans le monde !
Extraits :
… On n'est
plus une personne, ni même une personne malade. On est un malade, un Alzheimer ... Le regard des personnes est tronqué … La maladie m'oblige à
trouver des solutions pour essayer de comprendre ce que l'on me dit … Elle
m'oblige à me concentrer sur ce que le corps trahit de ce que mon interlocuteur
essaie de me dire … Je n'ai pas le choix … J'en fais des efforts pour me
maintenir dans le monde … La maladie, me force à développer ma confiance en
l'autre. Lorsque l'on entend Alzheimer,
tout le monde, je crois, associe la maladie à des pertes de mémoire ... Après
tout, cela arrive à tout le monde d'oublier quelque chose ! …
En
revanche, je suis aussi amenée à vivre des oublis d'un autre type, des oublis qui
n'ont rien de classique et qui
transforment ma réalité. Autant le dire tout de suite, je ne vis plus toujours
dans votre réalité … Par exemple, je suis allée réclamer une commande que je
suis sûre d'avoir passée. Arrivée là-bas, les vendeurs m'ont assurés que je
n'avais pas fait de commande. Et pourtant je peux affirmer que je suis certaine
de moi : je l'ai passée cette commande ! Que s'est-il donc réellement
passé ? … Parfois des objets apparaissent à la maison : d'où
viennent-ils ? Comment sont-ils arrivés là ? …
Ce sont
juste quelques exemples, de manière à essayer de faire sentir la différence
entre un simple oubli, et une
réalité différente. … Si demain on vous annonce que le ciel est vert à pois
rouges, saurez-vous faire suffisamment confiance à l'autre pour le croire, même
si pour vous il est bleu ? … Ne risquez-vous pas d'être amené, dans ce cas
à défendre avec force, voire avec agressivité, votre réalité intérieure ?
… Perdre confiance en ma réalité, au profit de la réalité de l'autre. …
Michel
Audiard a eu cette merveilleuse formulation : Heureux
les fêlés, car ils laissent passer la lumière. La maladie va me rendre démente, fêlée... J'espère que cette maladie
me permettra de laisser passer la lumière, d'apporter quelque chose aux autres :
un regard, une façon d'être. Quelque chose de positif dans la vie de ceux qui
me côtoieront !
Le second et le troisième sont tournés vers les aidants, les proches qui viennent en appui.
Extraits :
Alzheimer
est une maladie qui dure longtemps, une dizaine d'années en moyenne, et qui est
évolutive … Le malade va devoir être aidé pour des tâches du quotidien de plus
en plus simples … Malgré la bonne volonté de l'aidant, il y a un fort risque
d'épuisement physique et psychologique si le recours à une aide extérieure
n'est pas anticipé. D'autant que le malade n'a pas conscience de l'étendue de
sa maladie et de ses besoins: il n'est donc pas rare qu'il résiste aux soins.
Il peut même devenir agressif … La relation se détériore à mesure que la
lourdeur des tâches s'accroît …
Quels signes doivent alerter sur l'état de santé général de l'aidant ? … Quand l'aidant ne s'octroie plus de temps
pour lui, au point de négliger sa santé – il ne consulte plus son médecin
généraliste, son alimentation, son sommeil, ses loisirs. Ou encore des signes
similaires à la dépression …
Que recommandez-vous aux aidants pour limiter les difficultés ? … Tout d'abord, il ne faut pas rester seul.
Nous conseillons de contacter des professionnels … Cela leur permettra de savoir
vers qui se tourner quand le besoin commencera à se faire sentir. Car la
maladie entraîne vite dans une spirale infernale …Enfin, il est essentiel de
conserver une activité sociale pour discuter et rire avec d'autres personnes.
Majoritairement
âgés, les couples malades/aidants conjoints sont encore aujourd'hui construits
sur la valeur de l'engagement, le sens du devoir et la notion culturelle de couple pour
le meilleur et pour le pire tel que
défini par la loi du mariage … Pourtant, l'usure et
l'épuisement nerveux de l'aidant, ses propres difficultés de santé, pourront et
devront à un certain moment remettre en cause la forme de cet engagement … Rester
debout aux côtés de son mari, de son épouse malade, autrement, dans un autre
lieu de vie, l'établissement d'hébergement pour personne âgée dépendante …
Une telle décision ne coule pas de source ni sur le
plan moral, affectif, ni sur le plan matériel et financier … Par exemple, confier son conjoint malade à des mains étrangères … La présentation souvent
caricaturale … idyllique d'établissements en présence d'un ministre de la
santé visitant de charmantes vieilles dames … À l'inverse, de sordides images filmées en caméra cachée …
Cette
décision aura aussi des conséquences financières … d'autant plus lourdes que le
malade est le mari sur lequel repose l'essentiel des revenus de la retraite. Les
épouses de ces générations n'auront plus alors pour continuer à vivre chez
elles que le minimum vieillesse, autrement dit au-dessous du seuil de pauvreté
en France … dans le langage de ces femmes âgées, cela ne veut pas dire se payer
des loisirs, des téléviseurs à écran plat, des Smartphones et des produits de
consommation, mais ne plus pouvoir faire de cadeaux à Noël et aux anniversaires
de leurs petits-enfants, ne plus changer ses lunettes, ne plus se faire soigner
les dents.
Un malade, c'est toute une famille qui a
besoin d'aide.
Le quatrième se focalise sur le moment de l’annonce
du diagnostic, et après: sur la manière de s’adapter à cette situation et de chercher à
continuer à être reconnu(e) comme personne. Cela recoupe à plusieurs reprises
ce qui s’est manifesté de la part de Magali.
Extraits :
Que nous
disent les personnes malades à la suite de l'annonce diagnostique ? … La
grande majorité des personnes interrogées ont énormément insisté sur la
nécessité pour elles de ne pas se laisser envahir par l'angoisse de l'annonce et
par celle des perspectives qu'elle recouvre. Il s'agit bien entendu d'un moment
choc, un traumatisme qui est décrit comme faisant basculer leur vie de la
minute à l'autre … Beaucoup d'entre-elles ont jugé l'annonce diagnostique souvent
maladroite et inadaptée voire brutale … Elles évoquent la souffrance ressentie
face au discours qui leur est tenu ou qu'elles entendent comme tel : Vous ne
pouvez plus rien faire que par l'annonce
elle-même …
Suite à
l'annonce la nécessité presque immédiate est de faire face et vivre au jour le
jour : Elles essayent de relativiser la situation … il faut maintenant faire avec en vivant leur vie au jour le jour … Cette
vie au jour le jour leur permet de vivre de manière moins anxiogène la
situation en évitant de se projeter et en redonnant tout son sens à l'instant
présent …
Elles réclament
qu'on les aide à maintenir une image de soi valorisée en réinvestissant des
activités qui font moins appel à leurs compétences cognitives qu'à leurs
compétences affectives et émotionnelles … On retrouve chez
toutes trois axes essentiels :
La grande
majorité a exprimé l'importance de mettre en place de nouvelles activités afin
d'occuper le vide laissé par la réduction progressive de leurs occupations
habituelles : activités physiques, sorties sociales et culturelles,
contacts avec des animaux, participation à un club etc. L'important est de
trouver de quoi s'occuper qui soit adapté à leur envie et à leur personnalité
et qui ne leur soit pas imposé par l'extérieur.
Agir sur
l'évolution des troubles et compenser les difficultés : travailler sa
mémoire ; suivre des séances d'orthophonie, trouver des outils qui
compensent les difficultés (agendas, calendrier) … Elles ont le sentiment que
cela leur permet à défaut de pouvoir guérir cette maladie, d'en ralentir les
effets. Elles ont également besoin de mettre en place des habitudes afin de ne
pas être trop déstabilisées par le changement ou les imprévus.
S'appuyer
sur leur proche notamment le conjoint. Elles évoquent souvent l'importance, la
patience et la gentillesse qu'il ou elle a au quotidien … Si elles déclarent en
général ne pas vouloir peser sur leur entourage, notamment leurs enfants, elles
attendent beaucoup de leur conjoint.
Les
personnes interrogées insistent sur le fait qu'être malade d'Alzheimer ne
signifie pas ne plus rien faire … Certaines d'entre elles expriment même la sensation
d'avoir découvert de nouvelles habiletés jusqu'alors non explorées qui leur
permettent de garder contact avec elles-mêmes, notamment à travers la pratique
artistique …
Pour
certaines d'entre elles la volonté est forte aussi de faire changer les
représentations négatives attachées à la maladie d'Alzheimer. Représentations qui
véhiculent une image de grande dépendance et de folie … Elles revendiquent
aussi le droit d'être reconnu comme une personne et non comme des objets de
soins passifs.
Le dernier élément ici fourni se réfère à une
vidéo sur les différents types de mémoire. C’est prioritairement tourné vers l’Alzheimer,
c’est charpenté, accessible et clair. On trouve ce document audiovisuel sur le
site suivant :
Comme l’ensemble dure au total une heure (qui passe
vite), on peut le découper en quatre parties d’environ un quart d’heure chacune,
que l’on retrouve sur YouTube :
Et afin de mieux suivre la présentation, l’illustration qui, en tête du présent billet représente une commode, pourra être utile : chaque tiroir représente un type différent de mémoire – certaines sont les premières atteintes, d’autres résistent plus longtemps.
Explication (un peu rapide) en attendant :
La mémoire
de travail
Cette mémoire permet de conserver les informations reçues pendant 2 minutes, par exemple : le
code d’une porte, un numéro de téléphone et permet – lorsque nous parlons –
d’être cohérent avec ce que nous disions en début de phrase.
Cette
mémoire est conservée au début de la maladie d’Alzheimer.
La mémoire épisodique
La mémoire épisodique concerne les événements de vie allant de 2
minutes à la petite enfance. C’est elle qui craque en premier dans la maladie.
En effet, le cerveau n’enregistre plus les événements quotidiens et le malade
ne peut plus les restituer. Cela concerne donc les événements récents – ceux qui
remontent loin restant conservés.
À titre
d’exemple, nous pouvons engager une conversation avec la personne sur des
événements de sa vie ancienne ; en revanche, elle ne saura pas répondre si
nous lui demandons ce qu’elle a mangé ce midi, ou quelle activité elle a menée hier.
La mémoire sémantique
C’est la mémoire des mots et du langage. Elle concerne les
notions générales telles que : la géographie, les langues étrangères… Tant
qu’elle se maintient – ce qui est généralement le cas – on peut avoir avec le
malade, des conversations d’ordre général (cuisine – sport – mode – jardinage –
politique …)
La mémoire procédurale
La mémoire procédurale concerne les gestes : tenir
fourchette et couteau ; marcher ; danser ; jouer d’un instrument ;
jardiner ; chanter...
À titre
d’exemple, chanter ensemble a plusieurs actions : celle de souder le
groupe ; faire travailler les mémoires épisodique (évènements plus anciens
que 2 minutes) et procédurale (les gestes) et enfin accroître l’estime de Soi.
Quand la
mémoire procédurale craque, le malade ne peut plus marcher, ni s’alimenter
seul.
La mémoire implicite
La mémoire implicite est celle qui reste active le plus
longtemps. C’est la mémoire inconsciente. Tous les évènements que les malades
vivent y restent ancrés – mais comme ils n’en ont pas conscience, ils ne
peuvent simplement plus restituer ce qui a été vécu à ce niveau.
Le
présentateur la qualifie de mystérieuse : grâce à elle un lien unit parfois
ceux qui prennent soin des malades… La
belle qualité de ce métier est de créer ce lien si particulier.
Ce
billet est le huitième et dernier d’une chronique vécue (et en cours) sur
l’Alzheimer. Les noms des personnes et des organismes ont été changés, afin
d’en préserver l’anonymat.
L'illustration
est extraite de la vidéo sur les différents types de mémoires.
lundi 29 juillet 2013
Alzheimer – g
Outre le choix d’une résidence d’accueil, l’autre élément
marquant pour 2013 est l’aboutissement d’un cheminement nécessaire mais long et
délicat : se rendre devant le Juge des tutelles et en obtenir une décision
qui soit adaptée à la situation.
De la nécessité d’une protection juridique
Nécessaire, les spécialistes du domaine vous le
confirmeront.
Dès la prise de contact avec l’hôpital PARIS-ÉTIENNE, l’intérêt d’une protection juridique légale a été mentionné. Car une personne présentant des signes de l’Alzheimer peut, par moments, se mettre en situation de fragilité face à des propositions financières malveillantes. Il s’agit de désigner quelqu’un qui puisse intervenir directement à partir du moment où ses biens patrimoniaux sont en jeu – l’achat ou la vente d’un bien immobilier, par exemple.
Le Professeur du Service de gériatrie est revenu à la charge en insistant fortement.
Dès la prise de contact avec l’hôpital PARIS-ÉTIENNE, l’intérêt d’une protection juridique légale a été mentionné. Car une personne présentant des signes de l’Alzheimer peut, par moments, se mettre en situation de fragilité face à des propositions financières malveillantes. Il s’agit de désigner quelqu’un qui puisse intervenir directement à partir du moment où ses biens patrimoniaux sont en jeu – l’achat ou la vente d’un bien immobilier, par exemple.
Le Professeur du Service de gériatrie est revenu à la charge en insistant fortement.
Madame, vous faites ce que vous voulez de votre argent.
Ceci n’est pas en cause. Mais croyez-moi : Vous êtes fragilisée. Et moi,
de par ma fonction, je connais malheureusement plusieurs cas où des personnes
fragilisées se sont fait avoir. Je vous demande de nommer quelqu’un qui puisse
avoir un regard et une possibilité d’intervention sur vos comptes.
Quelques mois plus tard, il demande à Magali si elle s’est préoccupée d’avoir
un garant financier, non pas pour lui enlever l’autonomie financière mais pour la
protéger. Il lui donne l’exemple récent d’aventures dont a été victime une de
ses patientes (intervention surfacturée par un plombier ; paiement deux
fois d’une note au restaurant – à chaque fois, son fils a eu le plus grand mal
à intervenir puisque sa mère n’avait pas fait la démarche de le faire nommer en
tant que garant) :
Madame,
il faut prendre les moyens de vous protéger. Même si vous avez l’impression de
ne connaitre que des bonnes personnes, il n’y a pas que des gens gentils… Faites
le nécessaire maintenant …
Ceux
qui ont lu les épisodes précédents feront par ailleurs le rapprochement avec
les discussions de Véra avec le Service
d’Opposition pour les cartes bancaires, suite à l’oubli du sac (que Magali croyait avoir été volé) dans les vestiaires de la
chorale : Véra n’avait aucune
autorisation officielle pour intervenir.
Quelques semaines après, c’est au médecin traitant de
prendre la relève :
Madame, vous souffrez d’une maladie qui peut vous mettre
en de graves difficultés. Votre état peut être stable comme aujourd’hui. Mais,
du fait de votre maladie, il arrive tout d’un coup des moments dont vous n’êtes
pas responsable, où il y a du brouillard, une perte de repères, une confusion…
Je vous ai vu en consultation dans ces deux états – tout peut arriver : un
accident…, vous perdre…, être victime de personnes beaucoup moins
bienveillantes que les personnes de votre entourage…, de prendre des décisions
que ne vous ne prendriez pas à d’autres moments…
Magali dit qu’elle comprend bien
pour l’aspect financier, mais qu’elle ne veut pas que l’on décide à sa place.
Le médecin souligne qu’il ne s’agit pas de prendre des décisions la concernant
sans qu’elle soit au courant et qu’elle gardera la main sur les décisions
importantes concernant sa vie :
C’est une mesure essentiellement financière. Ce qui est
très important à savoir pour vous est que vous avez intérêt à choisir vous-même
la ou les personnes de confiance. Et que cette ou ces personnes sont
responsables devant le Juge et doivent lui rendre des comptes régulièrement.
Magali acquiesce : S’il y a
un contrôle régulier fait par le juge, alors d’accord. Ce sur quoi, le médecin
signe une feuille à envoyer au Juge des tutelles… Et suggère qu’il y aura
sûrement quelqu’un de la famille pour aider à préparer un dossier.
Ce sera Trevor
Depuis quelques années, Magali s’adresse à Trevor pour qu’il
lui donne un coup de main dès qu’il s’agit d’aspects financiers.
Cela
se limite en fait à la préparation, à une présence en deuxième position puis à
une sorte de débriefing à l’occasion de la rencontre annuelle avec le
conseiller de sa banque. Ce qui s’est essentiellement traduit par la mise en
place de deux volets : celui des liquidités (compte-courant, livret A et
autres livrets), et celui de placements à plus long terme, du type
assurance-vie. Plutôt fourmi, Magali dépense alors moins que ce que lui versent ses
caisses de retraite : ce qui alimente le volet du long terme et constitue
ainsi des réserves pour le futur. En toile de fond – mais on sort du rôle
direct de la banque – un petit bien immobilier qui lui sert de logement
principal.
Constat :
d’une année sur l’autre, Magali – jusqu’alors gestionnaire avisée – semble avoir eu plus de difficulté
à préparer, suivre et se souvenir d’un entretien aux enjeux pourtant assez limités.
Auparavant interlocutrice naturelle de son conseiller, elle s’est
progressivement réfugiée dans des questions de compréhension et dans une fiévreuse prise
de notes.
Vers le milieu de
2012, après la mise en place d’une assistance à domicile et l’inscription à des
ateliers de mémoire, les deux organismes en charge signalent des prestations
impayées à Véra et à Trevor – personnes de confiance désignées par Magali. C’est à cette occasion que l’on s’aperçoit
que des factures envoyées par PHARE DE VISSAC ou
par TASCA DE PASTEL, sont restées en souffrance parce que les
enveloppes n’avaient pas été ouvertes ou parce qu’elles se sont glissées dans
d’autres piles de papier.
On convient que Trevor se rendra chaque mois chez Magali pour faire le point et, si
besoin, rattraper ce qui doit l’être. Une vérification de principe, à l’aide
des talons de chèque que Magali remplit scrupuleusement, et les relevés bancaires mensuels, permet de rassurer cette dernière qu’on ne paie pas deux
fois la même chose.
Sur un autre
point, cette première découverte conduit celle d’une situation encore plus
gênante :
Les appels de fonds que le syndic adresse à Magali
en tant que copropriétaire font état d’arriérés importants. Certes, celle-ci
s’en était plus ou moins aperçu, les avait jugés incompréhensibles et avait écrit qu’elle supposait qu’il y avait une erreur.
Une analyse plus détaillée fait remonter à un an plus tôt – en
2011 : plusieurs appels de fonds trimestriels n’ont pas été honorés. Trevor prend contact
téléphoniquement et par messages Internet pour avoir un détail suffisant, ce
qui permet de régler l’affaire sans trop d’histoires avec un an de retard.
Il est apparu
clairement à cette occasion que les démarches de Trevor n’avaient pas de caution légale et que ces organismes concernés
auraient par exemple été en droit de refuser de lui parler ; ou d’entamer une
procédure contentieuse ; ou encore de refuser de poursuivre les prestations
d’assistance tant qu’ils ne seraient pas rentrées dans leurs fonds.
Tel a été le
point de départ d’une démarche commune sur laquelle Magali s’est dite d’accord, afin que Trevor puisse agir
en parfaite clarté et ne pas se voir opposer par les fournisseurs de sa sœur un
refus de le voir intervenir dans leurs démêlés avec elle.
Préparer un dossier destiné au Juge des tutelles
Il apparaît
clairement que la personne responsable sera désignée par ce que
l’on appelle le Juge des tutelles. C’est Trevor que Magali – qui décide de présenter elle-même la
requête – souhaite voir désigné.
Cette appellation, Juge des tutelles, n’est pas enthousiasmante pour Magali – au contraire : le seul mot de tutelle signifie pour elle que
l’on va décider à sa place et la hérisse. Une partie de sa formation avait
relevé du domaine du Droit : elle estime en saisir des implications qui
lui déplaisent.
Il faut commencer par désamorcer ces craintes liées au
vocabulaire : le Juge des tutelles s’occupe d’une multitude de situations
particulières qui ne débouchent pas systématiquement sur une mise en tutelle.
Cette dernière éventualité est la forme la plus contraignante, notamment au
regard de la vie privée, du suivi de santé ou de la vie civique : les
autres formes – notamment celle envisagée dans le dossier – portent
essentiellement sur les comptes et laissent à la personne protégée une grande
indépendance de décision et d’action dans les domaines précités.
En revanche, ni le professeur de l’hôpital PARIS-ÉTIENNE ni le médecin traitant ne
peuvent faire une ordonnance à ce sujet qui sort du domaine strictement médical
(à cet égard, le Juge demande l’avis écrit d’un médecin expert qualifié)
Magali et Trevor entreprennent ensemble la rédaction de quelques
pages qui seront insérées dans le dossier à remettre au Juge, afin de
l’éclairer sur le contexte, se présenter et présenter le reste de la fratrie qui apporte simultanément son
appui, et indiquer ce qu’ils attendent de la décision qui sera prise.
La
rédaction de ce document commun a été une occasion fructueuse pour identifier
les points importants et comment y faire face. Rédigé le plus souvent par Trevor, il a, à chaque étape, été remis à Magali qui faisait
ses remarques au cours d’une lecture à voix haute, puis le gardait pour plus mûre
réflexion avant finalisation au cours du 1er trimestre 2013.
En grande partie absorbé par l’installation dans la
résidence d’accueil DIRE
TA MÉLODIE, le 2nd trimestre est vite passé : il a fallu
attendre juin pour avoir l’avis du médecin expert qualifié, remettre le dossier,
être entendu par le Juge et que celui-ci arrête sa décision.
Une curatelle renforcée
Faisant sienne la conclusion du médecin expert qualifié, le
Juge opte pour une curatelle renforcée. Cette mesure porte prioritairement sur la protection de
biens de Magali.
Le curateur – ici Trevor – n’intervient pas (ou intervient seulement qu’en conseil) pour
les décisions concernant la santé, la vie civique et la vie professionnelle ;
son assistance peut être requise dans certains actes de la privée interférant
avec la gestion de ses biens.
De façon non détaillée et non exhaustive mais pour l’essentiel :
Il
n’a pas le droit d’ouvrir, de modifier ou de fermer un compte ou un livret au
nom de Magali. Sur ces comptes, il est habilité à recevoir les revenus de celle-ci
(ex. : pensions de retraite) et à régler ses dépenses (ex. : hébergement
en maison de retraite). Magali pourra disposer directement d’un compte sans découvert et d’une carte
bancaire associée sans accès à un crédit, alimentés par les excédents des
comptes ci-dessus.
Pour
d’autres actes de gestion (ex. : ceux qui engagent le patrimoine, soit
immobilier, soit des valeurs financières), c’est le principe de la double
signature : Magali signe mais Trevor doit contresigner.
Certains de tels actes qui n’engagent pas à grande conséquence peuvent être
fait à la seule initiative de Magali.
Ce billet est le septième d’une
chronique vécue (et en cours) sur l’Alzheimer. Les noms des personnes et des organismes
ont été changés, afin d’en préserver l’anonymat.
L'illustration
est une des peintures réalisées par Magali à l'occasion d'activités qui lui ont
été proposées.
Alzheimer – f
2011 : Signes
avant-coureurs, suivis d’une prise de conscience dans l’entourage, par la famille puis par Magali – ce qui pousse à déclencher une consultation
médicale dans un service hospitalier de gériatrie.
Dès le début de 2012, le diagnostic est clair : Alzheimer. Mise en place d'une assistance à domicile et la fréquentation d’un atelier de mémoire, tandis que la fratrie se mobilise pour que Magali, qui vit seule, ne soit pas entièrement laissée à elle-même.
Dès le début de 2012, le diagnostic est clair : Alzheimer. Mise en place d'une assistance à domicile et la fréquentation d’un atelier de mémoire, tandis que la fratrie se mobilise pour que Magali, qui vit seule, ne soit pas entièrement laissée à elle-même.
Nous arrivons au seuil de 2013. À l’incitation du Service de
gériatrie de l’hôpital PARIS-ÉTIENNE
– et tout autant du médecin traitant – une recherche débute pour trouver un
établissement d’accueil. Démarche effectuée avec sérieux et à laquelle Magali est
directement associée… mais le discours est que cela reste exploratoire.
Le choix de vivre dans un établissement d’accueil
Les choses vont néanmoins se précipiter : l’un des
établissements visités se détache un peu du lot.
Dès
l’issue de la visite initiale, Magali
réagit plus ou moins de la façon suivante : Ça
m’a plu et c’est sympa. La directrice a l’esprit ouvert, les gens là-bas ont
l’air de bon niveau et il y a pas mal d’animations. Un autre plus : Il
y a des cousins qui habitent à proximité et c’est rassurant. Bémol : C’est
un peu loin. Si je reste à Paris, je reste dans mon quartier. Je peux aller à
la chorale. Je peux aller à mes activités dominicales et paroissiales.
Cette impression est partagée par ses sœurs qui l’y ont
accompagnée. Il y a aussi la recommandation de quelques connaissances qui sont
à même de porter une appréciation fondée, ou qui ont eu des parents à cet
endroit. Pour Magali, le côté devenu presqu’insupportable d’avoir à s’assumer seule en dehors des
activités que l’on a organisées pour elle et des pourtant nombreuses présences
familiales, a certainement aussi fait pencher dans ce sens.
Une petite période d’essai est envisagée, à mi-avril une
place est disponible et cette tentative prend corps. Les semaines passent,
l’essai se prolonge, la décision prend informellement puis formellement corps
de s’installer dans l’établissement en question : DIRE TA MÉLODIE.
Il y a eu quelques réticences.
Ce n’est pas tant la vie en collectivité : bien qu’ayant eu une vie de célibataire, Magali a, dans sa jeunesse et par la suite eu bien des occasions d’y goûter.
Ce n’est pas tant la vie en collectivité : bien qu’ayant eu une vie de célibataire, Magali a, dans sa jeunesse et par la suite eu bien des occasions d’y goûter.
L’irritation
principale lui est venue du sentiment d’être emprisonnée. La maison ne prend
pas le risque de laisser ses pensionnaires sortir non accompagnés. À
l’expérience on le comprend : depuis qu’elle est là, cela fait une bonne
trentaine de fois que tel ou tel membre de sa fratrie est allé se promener dans
le quartier et les espaces de verdure environnants : ramenée à une
centaine de mètres du Foyer, Magali
n’est toujours pas en mesure de retrouver son chemin.
Il
faut aussi un code pour sortir de l’établissement ou y rentrer – ainsi que pour
changer d’étage avec l’ascenseur. Au début, on hésitait à le lui donner – ce
qui l’exaspérait. On s’est aperçu ensuite que ce n’était pas si important : Magali a noté ces quatre chiffres en plusieurs endroits…
mais s’avère incapable de s’en souvenir ni de retrouver où elle les a écrits
(en revanche, pas de problème pour le code de sa carte bancaire, qu’elle a bien
fixé depuis de nombreuses années : un retrait au distributeur de billets
se fait en deux temps, trois mouvements).
Dans
le même ordre d’idées, on en est venu à mettre, par exemple, sa carte bancaire
(justement) et ses pièces d’identité en sûreté dans un coffre de
l’établissement. Ici, l’attitude de Magali est plus ambigüe : elle a le sentiment d’en être
dépossédée mais se sent en même temps apaisée, en raison d’une peur un tantinet
obsessionnelle car généralement infondée qu’on vienne lui voler quelque chose
de précieux dans sa chambre.
Petit
sentiment curieux enfin que, dans cette résidence qui fait office de maison de
retraite – même si elle est davantage orientée vers ceux qui ont les troubles
de l’Alzheimer – elle figure parmi les plus jeunes, voire la plus jeune, avec
pourtant la perspective qu’elle y restera probablement le reste de son temps.
L’appréhension de quitter son quartier et ses activités
coutumières à Paris semble s’être estompée. Son nouvel
environnement est calme, tout proche d’un centre-ville quasi piétonnier et de
grands espaces de verdure.
Elle apprécie particulièrement la beauté d’arbres qu’elle voit directement de la fenêtre de sa chambre. Et de ceux qu'elle contemple au cours de ses promenades.
Le fait que, outre sa famille, soient venus la voir des amis ou des membres de la communauté paroissiale où elle œuvrait, lui rend plus supportable la coupure qui s’est effectuée.
Elle apprécie particulièrement la beauté d’arbres qu’elle voit directement de la fenêtre de sa chambre. Et de ceux qu'elle contemple au cours de ses promenades.
Le fait que, outre sa famille, soient venus la voir des amis ou des membres de la communauté paroissiale où elle œuvrait, lui rend plus supportable la coupure qui s’est effectuée.
Ce billet est le sixième d’une
chronique vécue (et en cours) sur l’Alzheimer. Les noms des personnes et des organismes
ont été changés, afin d’en préserver l’anonymat.
L'illustration
est une des peintures réalisées par Magali à l'occasion d'activités qui lui ont
été proposées.
samedi 27 juillet 2013
Alzheimer – e
C’est au cours du 1er semestre de 2012 que Magali a pris
clairement conscience que ses troubles de mémoire relevaient de l’Alzheimer.
Grâce à son environnement, notamment médical et familial, elle a commencé à
recevoir une assistance à domicile et s’est inscrite à des ateliers de mémoire.
Cette orientation s’est poursuivie au 2nd
semestre qu’il faut classiquement scinder en deux étapes : l’organisation
mise en place pendant l’été, alors que les équipes médicales et les membres de
la famille adaptent leur propre emploi du temps à la période des congés. Puis le
temps qui va de la rentrée jusqu’à Noël.
Bien des événements ici relatés le sont grâce à des notes
prises sur le moment, ou à des échanges du type courriel. S’y est ajouté un document dit : Cahier à
rebours où Magali à qui il est confié en permanence, retrouve ce qui s’est fait ou dit. Même si
elle est a priori incrédule, elle peut faire le recoupement avec les
rendez-vous et annotations qu’elle avait inscrits à cette date
dans son agenda. C’est une aide rétro-visuelle de une mémoire du passé récent... dont
on sait qu’elle est la première à flancher.
La période estivale
Les deux pivots qui ont facilité l’organisation sont :
Que Magali a été accueillie à plusieurs
reprises dans sa famille, sur le lieu de leurs vacances. Elle a ainsi passé presque
la moitié des mois de juillet et août en Bourgogne, sur les rives de
l’Atlantique, dans les Alpes et dans un pavillon de la région parisienne.
Et que les organismes
d’assistance à domicile et d’animation des ateliers de mémoire ont fonctionné
tout au long de cette période – on a même si besoin fait appel à eux de façon
plus intense. En clair, tant qu’elle restait sur Paris, le rythme est dans
chaque cas passé de 2 fois à 3 fois par semaine.
De plus, presqu’à chaque interstice des amis parisiens venaient
lui rendre visite, sortaient avec elle ou l’accueillaient chez eux pour la
journée. Le dimanche, ceux de son équipe paroissiale prenaient le relais de
façon conviviale. En résumé, il n’y pas eu beaucoup de moments de solitude.
Le sac « volé »
Septembre peut être considéré comme un mois de
transition : certaines activités de longue date reprennent – telle une
chorale, où Magali,
dont la voix est entraînée a plaisir à se rendre. Et certain(e)s profitent des
derniers jours d’été pour souffler un peu : c’est le cas de Véra qui avait été
largement sur pont pour l’organisation et l’accueil : fin septembre elle
va prendre quelque détente du côté de la Bretagne et de l’île de Jersey.
Question à cent sous : Chorale + Jersey = ?...
Question à cent sous : Chorale + Jersey = ?...
De
retour de la chorale, Magali ne trouve plus son
sac. Suspicion et panique : on le lui a volé. L’ange gardien, c’est Véra. Magali
feuillette un répertoire, compose à minuit le numéro du mobile de Véra qui de Jersey, doit s’en
débrouiller seule – ses autres sœurs sont en province et Trevor à plus de 1500 km.
Elle
mobilisera dès l’aube une amie de Magali pour venir à la rescousse (celle-ci finira presque par disjoncter), puis la
personne en charge de l’assistance à domicile, ainsi que la responsable de la
chorale et la gardienne des locaux (qui ne s’y rend normalement pas les jours
où il n’y a pas de répétitions). Véra doit encore prévenir l’atelier de mémoire que Magali ne viendra pas ce jour.
Et
quoi d’autre ? Faire opposition pour la carte bancaire : trouver les
bons numéros de téléphone depuis Jersey, déployer quelques trésors de
diplomatie pour convaincre au bout du fil que, bien que l’on n'est pas
soi-même titulaire de cette carte volatilisée, opposition doit être néanmoins faite.
La
journée se passe, la gardienne finit son service normal, se rend aux locaux de
la chorale, y retrouve le sac dans le vestiaire, le remet à la chef de
chœur : restitution à sa propriétaire le lendemain.
Bien des proches de personnes atteintes de l’Alzheimer ont probablement
une histoire similaire à vous raconter. Ce que l’on peut noter à cette occasion
est, d’une part, la forte pression qui s’exerce alors sur l’entourage et,
d’autre part, la situation bancale où l’on se trouve lorsque l’on est conduit à
décider pour autrui – fut-il un parent – alors que l’on n’est pas mandaté pour
le faire. Et qui plus est, à distance.
Essayez enfin, plus tard, d’en parler avec
l’intéressée : elle ne se souvient pratiquement plus de cette concentration
d’attentions autour d’elle. Peut-être ne vous croira-t-elle même pas… et se
défendra, pour l’avenir, qu’on en prenne prétexte pour décider à sa place.
Une routine qui s’étoffe
Ce qui a été auparavant mis en place se poursuit au cours du dernier trimestre 2012 : l’aide à domicile assurée par PHARE DE VISSAC, les
ateliers de mémoire dans les locaux de TASCA DE PASTEL et un entretien toutes des deux semaines
avec la psychologue de l’hôpital PARIS-ÉTIENNE.
Début octobre, s’y rajoute la venue d’infirmières, matin et soir, pour
s’assurer de la prise conforme des médicaments et, en novembre, celle d’une aide pour
préparer son dîner, 4 soirs par semaine. Notons à ce sujet que suite a été
donnée à une recommandation de changer la cuisinière à gaz contre des plaques
électriques qui se régulent automatiquement.
Déplacements accompagnés
S'agissant d'accompagner
Magali quand elle
se rend à ses ateliers de mémoire, diverses solutions ont été expérimentées. Cela est devenu de plus en plus nécessaire, ne
serait-ce que pour éviter des oublis ou des confusions sur la date du jour,
mais surtout parce que qu’elle commence à craindre de ne pas s’y retrouver
toute seule malgré les fiches détaillées de trajet que Véra lui a confectionnées et rangées dans son sac… et
peut-être aussi parce que – l’hiver approchant – ces déplacements ne se font plus en plein jour.
On commence à faire appel à la personne qui assure l’assistance à domicile pour qu'elle l’accompagne dans les transports en commun…
Puis à une personne de confiance du quartier qui l’y conduit en voiture… C’est
enfin le minibus d’une société spécialisée qui ramasse
(après avoir passé un coup de fil quelques minutes auparavant) plusieurs
personnes qui vont aux mêmes ateliers de mémoire que Magali, puis les ramène au pied de chez
elles en fin de journée.
Démarches pour une résidence d’accueil
Comme on vient de le voir beaucoup de choses s’additionnent
qui absorbent du temps et de l’énergie dans l’entourage amical et surtout
familial de Magali
– et qui ont un coût financier.
Par ailleurs, à plusieurs reprises, Magali exprime un profond sentiment de
solitude : elle en parle ouvertement, supporte mal de rester dans son
appartement sans personne avec qui s’entretenir, appelle et rappelle au
téléphone pour 36 000 raisons comme de savoir quel jour on est, fait durer
ces communications une demi-heure ou une heure… ou sort quelques heures pour faire salon dans la
boutique accueillante à 20 mètres plus bas dans sa rue. La question du séjour dans un établissement d’accueil
commence à poindre.
Elle
est évoquée dès mi-octobre lors d’une consultation auprès du Chef de service de
gériatrie de l’hôpital PARIS-ÉTIENNE. Celui-ci
invite Magali à aller visiter des
résidences, juste pour voir dans lesquelles elle pourrait dire : Là, je m’y sens bien ou cette autre-là : Pour
rien au monde je n’y mettrai les pieds
ou encore : C’est pas
mal mais trop cher pour mon budget…
etc. Ça vaut la peine que vous preniez
le temps d’explorer ces possibilités,
ajoute-t-il. Et se tournant vers Véra : Bien sûr,
ça tombe sur les épaules de la famille de trouver les lieux que votre sœur
aimerait !
La balle est reprise au bond. Solmaz – dont plusieurs connaissances appartiennent au
milieu médical et d’autres ont été confrontées à des situations similaires – rassemble
des informations utiles. Certaines proviennent d’un site sur Internet, dont la
variété et la qualité des dossiers et conseils apportent une aide précieuse.
Il
s’agit de http://www.agevillage.com/. En grattant un peu, on repère les parcours
professionnels des fondateurs et participants – mais le biais potentiel qu’on
pourrait craindre ne semble pas pesant au regard de l’importance du contenu… et
peut souvent même être considéré comme un atout.
Cela permet notamment de constituer une liste
d’établissements avec lesquels prendre contact en priorité, de disposer de
premières informations sur chacun d’eux… et d’y aller avec une fiche des bonnes
questions à y poser, afin de comparer ensuite les points forts et les points
faibles de chacun.
C’est ainsi qu’en novembre et décembre, rendez-vous est pris
avec cinq lieux d’accueil à Paris ou en banlieue proche, auxquels Magali se rend, en
compagnie selon les cas d’une deux ou trois de ses sœurs – à chaque fois une
belle équipée… Est-ce dû au fait que, arrivé sur place par temps de neige, le
quatuor ayant été accueilli avec un vin chaud, le coup de foudre a fait élire telle
résidence plutôt que d’autres ? C’est ce que nous saurons dans un prochain
billet.
Les notes prises à ces occasions montrent l’intérêt porté à
la clarté et à la disposition des lieux ; au fait que Magali resterait ou
non à proximité d’un quartier et d’activités dont elle a l’habitude ; aux questions d’hébergement, de nourriture, de rythme de vie et d’animation ;
à l’aspect accueillant et sympathique que l’on perçoit de la part des
personnes sur place, à la clarté des explications fournies ; à la
possibilité ou aux contraintes pour les pensionnaires de s’y déplacer et/ou de
sortir dehors, accompagnés ou non. Question finances : les prix se
tiennent… Mais une petite surprise choc, dans un cas particulier – les
visiteuses se voient quasiment poser une seule et unique question : La famille est-elle prête à signer pour se porter caution pour
leur sœur ?
Fin d’année
La trêve des confiseurs se rapproche. Magali est d’abord
invitée en Bourgogne, participe à la décoration du sapin et s’émerveille du
savoir-faire culinaire d’Héloïse.
Retour sur la région parisienne et accueil pendant quelques
jours chez Véra,
où elle est bientôt rejointe par la famille élargie qui défile, échange des
cadeaux et s’adonne à une bombance de bon aloi.
Parmi les commentaires de Magali : C'était très joyeux. J'avais un peu de mal à savoir qui était qui mais tout le monde semblait bien s'entendre, alors je ne suis pas fait de souci !
Parmi les commentaires de Magali : C'était très joyeux. J'avais un peu de mal à savoir qui était qui mais tout le monde semblait bien s'entendre, alors je ne suis pas fait de souci !
Pour la Saint-Sylvestre, ce sera au domicile du propriétaire
de la boutique voisine de son logement montmartrois, celle où elle fait
salon, et de la compagne de celui-ci. Souvenir d’une ambiance
chaleureuse… et encore en forme pour continuer à midi, le lendemain 1er
janvier, chez Trevor.
Ce billet est le cinquième d’une
chronique vécue (et en cours) sur l’Alzheimer. Les noms des personnes et des organismes
ont été changés, afin d’en préserver l’anonymat.
L'illustration
est une des peintures réalisées par Magali à l'occasion d'activités qui lui ont
été proposées.
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