dimanche 28 septembre 2008

Katyn

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Mars-avril 1940
Septembre 1939. Deux semaines après les Allemands par l'Ouest, les Soviétiques envahissent la Pologne par l'Est. 250 000 soldats polonais sont faits prisonniers et confiés au NKVD soviétique. Les simples soldats sont relâchés. En février 1940, restent environ 14 000 officiers de l'armée polonaise (dont des étudiants incorporés comme officiers de réserve) et de la police.
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Début mars, le Politburo (Staline, Molotov, Vorochilov, Beria…) signe un ordre d'exécution (en 1992, Boris Eltsine a remis ce document au président de la République de Pologne, Lech Walesa). 4 400 prisonniers sont abattus d'une balle dans la nuque et ensevelis dans la forêt de Katyn, non loin de Smolensk. Les autres sont tués à Kharkov ou à Kalinine. Quelques centaines seront épargnés. Au même titre, des résistants et fonctionnaires sont fusillés par une formation parallèle, l'OSO. D'où le nombre de 22 000 que l'on associe communément au « massacre de Katyn ».
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Août 1941. Peu après la rupture du pacte germano-soviétique, les Allemands en train d'envahir l'URSS découvrent un charnier près de Katyn. Progressivement, l'ensemble des corps sera exhumé. En 1943, Radio-Berlin accuse les Soviétiques. Ceux-ci répliquent que ce sont les Nazis qui ont commis ces atrocités au cours de leur avance de 1941. Ils maintiendront cette version jusqu'en 1990 et l'imposeront dans la Pologne communiste.
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(Source : Wikipedia : Massacre de Katyn – dans ses versions française et anglaise, ici consultées, ainsi que roumaine et en hébreu, cet article a été apprécié comme étant de qualité).
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Ainsi – au cours de la guerre, puis pendant des décennies, et semble-t-il encore aujourd'hui sur un mode plus feutré – il a été difficile de démêler la vérité des diverses propagandes.
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Le film de Wajda

Katyn est le titre d'un film d'Andrzej Wajda, dont le père fut l'un des officiers assassinés à Katyn alors que lui avait 15 ans. Loin de passer sous silence le massacre lui-même, le film se place du point de vue des proches qui sont dans l'incertitude de savoir si leur fils, leur époux, leur père… fait partie des victimes… La propagande nazie (pendant la guerre) puis soviétique (avec le régime communiste en Pologne) cherchent à les enrôler, les intimider, les pourchasser.
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La sortie du film date du 17 septembre 2007 – anniversaire de l'invasion de la Pologne par les Soviétiques en 1939. Plusieurs journaux russes ont depuis publié des articles mettant en doute la fiabilité des documents faisant porter la responsabilité aux Soviétiques. Côté allemand, Angela Merkel a assisté en février 2008 à la présentation du film à la Biennale de Berlin.
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Succès du film en Pologne (3 millions d'entrées) mais - en ce mois de septembre 2008 - je n'ai pas réussi à savoir s'il est sorti ailleurs ni si cela est prévu. Et en DVD ? Rien à la Fnac, rien non plus dans sur les sites français, allemand, anglais, américain ou canadien d'Amazon. J'ai pu le voir (sous-titré en anglais), sur un DVD ramené par un ami polonais.
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jeudi 25 septembre 2008

Autisme

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L'autisme jusqu'alors mal connu
C'est un mot un peu étrange, qui évoque un renfermement sur soi-même, dont on se doute que cela se manifeste depuis l'enfance, dont on ne sait pas exactement ce qu'il recouvre tant qu'on n'y a pas eu directement affaire.
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Cela fait une vingtaine d'années, des personnes que je connaissais peu ou prou avaient fondé une association sur cette question. J'avais bien perçu qu'elles s'attaquaient à des situations réelles et difficiles, qu'elles menaient une sorte de combat personnel, familial, médical et social comme, me semblait-il, tant d'autres en mènent sur tel ou tel sujet qui leur tient à cœur. Mais, de ma part, cela n'allait guère plus loin et je restais avec une idée très vague de ce que cela recouvrait.
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Jusqu'à y être confronté dans ma famille.
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Le moment de la scolarisation
Pas tellement étonnant quant on apprend que, sous une forme ou une autre (il y a plusieurs sortes d'autisme), cela touche une personne sur 150. Autrement et trop rapidement dit, au moment de la scolarisation, on devrait trouver un enfant autiste pour 6 classes de 25 élèves. Car le moment de la scolarisation se révèle justement être un moment crucial, même si les manifestations peuvent théoriquement être détectées dès l'âge de quelques mois et commencent à être plus clairement perçues autour de 2 ans.
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Le comportement d'un enfant autiste ne correspond pas à ce que l'on attend habituellement d'un élève. Celui-ci doit être capable de se concentrer sur ce que l'on cherche à lui apprendre ; il doit rester à sa place quelques heures durant ; et il est en mesure de communiquer spontanément avec les autres enfants. Ce n'est pas aussi évident pour un enfant autiste – et les effets de la scolarisation vont souvent même à contresens de ce qu'il faudrait faire pour lui : cette vie en collectivité, la socialisation, déclenchent un repli sur soi et aggravent l'enfermement de cet enfant dans sa bulle.
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Que faire ?
Les familles ne savent pas exactement comment s'y prendre ; elles entendent 36000 choses contradictoires de la part de personnes censées s'y connaître ; et ne savent pas à quelles portes frapper. Le risque est de voir leur enfant rapidement marginalisé, orienté vers des institutions spécialisées qui font parfois plus office de parking qu'elles n'apportent de solutions. Il arrive que les progrès soient limités - quand ce n'est pas une aggravation et une régression. Cela peut aboutir au placement dans une institution psychiatrique lorsque l'autiste devient adulte.
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Mieux comprendre pour agir
J'ai utilisé le mot risque. Car ce n'est pas une fatalité absolue : d'autres voies existent. Et je partage la conviction de ceux qui ont fait – et qui continuent de faire l'effort de chercher à comprendre ce qui ce cache derrière l'autisme, qui se sont renseignés sur ce qui avait marché et ce qui n'avait pas marché pour remédier à la situation, qui ont dégagé une démarche pour aider l'enfant autiste à sortir de sa bulle. Au point de pouvoir le réinsérer comme tout un chacun, dans son milieu familial, social et notamment scolaire, de lui permettre de communiquer avec les autres, de progresser, d'être mieux armé pour la vie.
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De nouvelles pistes
J'y reviendrai dans ce bloc-notes. Les connaissances au sujet de l'autisme ont récemment fait et continuent actuellement de faire des progrès considérables : on se trouve beaucoup moins dans le brouillard que c'était le cas, il y a 20 ans, pour les membres de l'association que j'ai évoquée au début : leur dénominateur commun semblait surtout être le désespoir et l'espoir.
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En France, qui n'est pas parmi les premiers pays à avoir identifié les meilleures pistes en matière d'autisme, on commence à s'appuyer sur un travail de pionniers de maintenant plusieurs années, avec des résultats particulièrement probants – voire impressionnants.
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Ce billet fait partie d’une série qui permet de suivre l’évolution d’Émile (ce n’est pas son vrai prénom) depuis septembre 2008 : on y accède directement en cliquant sur le thème Autisme dans la marge de droite.
D’autres articles sont voisins, notamment ceux sous le thème du Cerveau, ainsi que ceux des 15 et 16 juin 2009 (Chiffres, langues… et Savants vs neurotypiques, qui figurent aussi sous le thème de l’Autisme), ou du 27 juin 2009 (Mémoire photographique)

mercredi 17 septembre 2008

Le Tribunal des Eaux


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Le beau voyage boucle sa boucle. Le titre de cet article reprend le début d'un célèbre sonnet datant du 16ème siècle, de Joachim du Bellay : Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage [...] puis s'en est retourné plein d'usage et raison [...].
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La route du retour
Après avoir longé la Méditerranée puis être passés d'Espagne en France, nous nous dirigeons vers le Nord : depuis cette année, nous bénéficions d'une autoroute qui traverse le Massif central et permet de rejoindre Paris d'une seule traite. Cet itinéraire n'est, à l'heure actuelle, qu'encore peu fréquenté… Cerise sur le gâteau : pas de péage jusqu'à Clermont-Ferrand, à l'exception du viaduc de Millau (voir photo ci-dessus). Dans la première partie du parcours, nous nous trouvons entre 600 et 1000 m d'altitude, il y a quelques brouillards, les piles du viaduc sont entièrement dans les nuages.

Où l'on fait connaissance avec Till
Nous voici à Paris : autre lieu, autre rythme, autres préoccupations... Till, avec qui nous bavardons à la terrasse d'un café, nous en donne une première preuve. Vous ne connaissez pas encore Till : curieux de beaucoup de choses, il se promène avec un sac en bandoulière, rempli de magazines, les feuillette avec avidité, s'arrête soudainement sur un article particulier : ça le fait rêver et cogiter à la fois - et il n'a de cesse de vous faire part des conclusions auxquelles il vient provisoirement de parvenir. Autre caractéristique : pour reprendre le jargon de McLuhan, Till est un homme de la galaxie Gutenberg (il privilégie le papier et l'imprimé) et non de la galaxie Marconi (la communication à base d'électronique, ce n'est pas pour lui). Mais il affirme ne pas trop s'opposer à ce que nous fassions appel à lui pour alimenter notre bloc-notes. Deux conditions : il nous confie la mise sur Internet et préfère que l'on le mentionne quand ça vient de lui.
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Le Tribunal des eaux, un cas d'école
Un exemple : nous évoquons avec lui le Tribunal des Eaux de Valencia. En moins de trois secondes, il entrouvre son sac bourré de revues et en sort un tout récent numéro de The Economist. Voyons... page 73, Commons sense... Il se met à traduire hâtivement l'article : "Bon, ils commencent par opposer l'usage communautaire des ressources au système de la propriété privée. Traditionnellement, dans des régions où les pâturages étaient accessibles à tout le monde, chaque gardien de troupeau avait intérêt à en faire croître la taille... Mais à partir d'un moment, il ne reste plus rien à brouter ailleurs. C'est habituellement le propre de nombreuses économies pauvres - et leur drame. Historiquement, une étape a été franchie au 18ème siècle, quand on est passé à un système de propriété (avec la mise en place de clôtures) - ce qui a rendu possible la révolution agricole en Angleterre. Il y a pourtant d'autres manières de s'en tirer : que les utilisateurs s'organisent entre eux pour gérer ces ressources communes."
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C'est là qu'ils en parlent ! s'écrie Till : "Ils donnent l'exemple des pâturages dans les Alpes suisses et celui des systèmes d'irrigation en Espagne ! Point essentiel : convenir de qui pourra utiliser ces ressources, et quand… Ce que chacun en retire doit être en proportion de ce qu'il y apporte (c'est ce qui se passe au Tribunal des Eaux : les amendes sont estimées en jours de gardiennage du système d'irrigation). Chaque utilisateur doit pouvoir s'exprimer. Autre impératif, porter davantage d'attention à surveiller les abus et résoudre les conflits qu'à sanctionner et punir."
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... et s'en est retourné, plein d'usage et raison...
Attention, attention… car ce que l'on croit être un mieux se révèle souvent l'ennemi du bien. Quand une administration ou un gouvernement intervient avec ses gros sabots dans ce magasin de porcelaine de relations sociales destinées à gérer des ressources communes, formalisées juste ce qu'il faut entre utilisateurs, cela peut se transformer en une tragédie. L'article Common sense évoque ici la sécheresse au Sahel dans les années '70 ?

Till aurait bien voulu nous entretenir de bien d'autres sujets. Mais trop aurait été trop. A l'expérience, chacun sait qu'après un vol cosmique, la rentrée dans l'atmosphère demande un minimum de doigté pour éviter de se volatiliser comme une étoile filante. Till s'est finalement satisfait d'un second café... décaféiné.

lundi 15 septembre 2008

Valencia

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Nous quittons l'Andalousie
Nous avions abordé l'Andalousie par le Nord, en traversant la Sierra Morena, au puerto de Despenaperros (les chiens que l'on a précipités). Avant de la quitter, nous nous éloignons de Granada par l'Est, en nous faufilant le long de la Sierra Nevada, en franchissant le puerto de la Mora.

Valencia
A la différence des précédentes qui étaient bien à l'intérieur des terres, la ville se situe au bord de la mer, d'une Méditerranée au sens plein, et non dans un détroit entre la péninsule et l'Afrique, allant se perdre dans le vaste océan Atlantique. Valencia est la 3ème ville d'Espagne - 800 000 habitants – le double avec son agglomération.
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Son histoire est à la fois proche de celle des villes déjà visitées et en même temps plus compliquée. Présence arabe du 8ème au 13ème siècle, comme à Cordoba et Sevilla. Mais tantôt plus apaisée et commerçante, tantôt entrelardée de reconquêtes partielles où apparaît la légendaire figure de Rodrigue, du Cid… et celle d'une Chimène avec qui ses rapports n'ont rien à voir avec ce qu'a imaginé Corneille. S'il faut trouver un Âge d'Or à Valencia, on s'entend généralement pour dire que c'est le 15ème siècle.

Il y a le cœur de la ville et il y a ses environs. La vieille ville est marquée à ce point par l'histoire depuis l'époque romaine que le moindre aménagement provoque une découverte, donc l'entreprise de fouilles et le report, sinon l'arrêt du projet initial. Point de repère : sa cathédrale. Au delà, Valencia est un musée des urbanismes et des architectures au fil du temps.
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Dans le lit de l'ancienne Turia
Le détournement de la Turia a ouvert la porte à des réalisations très modernes. La Turia serpentait dans Valencia avant de se déverser dans la mer. Sujette à de brusques crues, elle inondait des quartiers entiers, faisant de nombreuses victimes. Il fut décidé, voici un demi-siècle, de la détourner vers un nouveau lit qui ne sert, en fait, qu'au moment de ces crues… D'ordinaire, son débit emprunte de larges canalisations au-dessus desquelles on a construit des autoroutes de la périphérie valencienne.
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L'ancien lit – que l'on traverse toujours en empruntant les anciens ponts – a été transformé en une coulée verte : ensembles sportifs et jardins. Plus près de l'embouchure, des édifices très modernes : Cité des Arts et Sciences, avec Palais de la Musique, Institut d'Art moderne, Musée océanographique
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Le Tribunal des Eaux
L'eau joue un grand rôle à Valencia, région où l'on ne fait pas que cultiver des oranges : si la paella tire son nom de la poêle où on la fait, le riz vient de rizières alentour. Ressource potentiellement rare pour l'irrigation, l'usage de cette eau demande à être régulé. C'est le rôle du Tribunal des Eaux – constitué de représentants des communautés d'irrigation – qui se réunit, chaque jeudi à midi, devant la porte des Apôtres de la cathédrale. Il prend connaissance des litiges et décide de façon irrévocable. Depuis des siècles, tout se passe oralement, en valencien.
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Histoire d'eau
Belle fin d'été. Une eau à 27° baigne les longues et larges plages de sable fin. Coups de soleils garantis au bout d'une demi-heure pour qui ne prend pas de précaution. Chaque soir, des nuages venus de la Méditerranée couvrent le ciel valencien. Il va pleuvoir, s'inquiète Selenia. Que nenni – telle est la réponse – il ne pleut pas ici en cette saison. Effectivement, pas une goutte pendant nos 5 ou 6 jours sur place. Quand nous reprendrons la route en direction de Barcelone, il nous faudra jouer des essuie-glaces. Juste un peu. Mais nous apprendrons à notre arrivée qu'une demi-heure durant, une trombe d'eau s'est abattue sur la ville que nous venions de quitter.
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Et aussi...
Plus au sud, le lac Albufera est au cœur de l'un des plus grands parcs naturels d'Europe, abritant des milliers d'oiseaux. N'oublions pas non plus - j
e n'en ai rien dit - les Fallas, l'horchata, les plages, le port, l'America Cup, des équipes médicales de pointe, l'architecte Santiago Calatrava…
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Cet article est illustré par un tableau de Joaquín Sorolla (1863-1923).
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dimanche 14 septembre 2008

Granada

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Une présence prolongée
A ses débuts, l'histoire de la période arabe de Granada n'est pas sans ressembler à celle de Sevilla : dépendance puis émancipation par rapport au califat de Cordoba ; arrivée des Almoravides puis des Almohades…
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Mais elle n'est pas directement touchée par la Reconquista du 13ème siècle : car le fondateur de la dynastie des Nasrides passe alors un accord avec le roi de chrétien de Castille, dont il reconnaît être le vassal. En ces temps de paix, la ville devient une capitale belle et prospère. Témoignent de cette époque los Palacios Nazaríes (les Palais nasrides), joyaux dans l'enceinte du château rouge, de l'Alhambra.
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Cet accord porte à 8 siècles, au lieu de 5, la présence arabe dans cette partie de la péninsule. Mais – dissensions internes obligent – c'est reculer pour mieux sauter : au début de 1492, Boabdil est contraint de remettre les clés de la ville (Pleure comme une femme ce que tu n'as pas su garder comme un homme lui dit sa mère).
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Six mois plus tard, Christophe Colomb s'embarque vers ce qui se révèlera être l'Amérique. Après l'âge d'or de Cordoba (10ème siècle) puis celui de Granada (14ème siècle), le temps est venu pour Sevilla.
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Les palais nasrides

La ville de Grenade présente un relief chahuté – défi pour les nombreux courageux qui empruntent la grimpette d'une demi-heure pour aller visiter l'Alhambra. Des minibus permettent d'y aller pour 1,10 euro… et autant pour la descente.
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Joyaux de l'Alhambra : les palais nasrides. Au pluriel, car on en dénombre trois, accolés les uns aux autres et respectivement organisés autour de la cour de la Chambre dorée (palais Mexuar), de celle des Myrtes (palais de Comares) et de la cour des Lions (… palais des Lions). Cette dernière, la plus célèbre, était en réfection lorsque nous sommes passés. Consolation : l'agréable jardin de Lindajara (les yeux de la maison d'Aïcha) auquel on accède peu après et qui illustre cet article.
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L'afflux des visiteurs est tel qu'à la remise des tickets pour l'Alhambra, on leur affecte un créneau d'une demi-heure pour l'accès aux Palais nasrides (environ une centaine de visiteurs à chaque fois)… et tant pis pour les retardataires. Ce qui impose parfois d'acheter son ticket plusieurs jours à l'avance, en haute saison (possible via Internet).

Les carmen et l'Albayzin
Au pied de la face nord de l'Alhambra passe le Darro – on se promène en le longeant, avant d'attaquer le flanc opposé, de serpenter entre les carmen (villas cossues avec leur petit jardin) et bénéficier, depuis le quartier de l'Albayzin, d'une vue splendide sur l'Alhambra.
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Les oiseaux de la Bib-Rambla

Non loin de la cathédrale (Selenia tenait à voir le mausolée de Jeanne la Folle dans la chapelle royale), la grande place rectangulaire et ombragée abrite quantité de cafés et restaurants. C'est la Bib-Rambla. Quand le jour s'achève, quelqu'un doit appuyer sur un bouton car les arbres s'emplissent du vigoureux ramage d'une multitude d'oiseaux qui restent néanmoins invisibles – ce qui stimule celui des consommateurs placés en contrebas.
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La Vuelta
Nous étions arrivés un vendredi après-midi à Grenade et en repartions le lundi matin. En voiture. Vous avez de la chance ! nous dit-on à l'hôtel. Car, avec la Vuelta (le tour d'Espagne cycliste), nous ne savons pas si nos clients sauront trouver leur chemin pour entrer dans Grenade demain samedi puis dimanche, et s'y déplacer ensuite. C'est ici que se déroule l'étape contre la montre, par équipes. C'est une marque qui assure le mécénat pour chaque équipe - une vingtaine de coureurs : on y trouve Bouygues, Cofidis, CA, Française des jeux, AG2R… Les haut-parleurs inondent le quartier de leurs commentaires. Foin des marques - cela se résume plutôt à : … les Français ceci, les Français cela…
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Affichage
A Grenade comme à Séville, j'ai pu apprécier un affichage donnant en permanence l'état de la pollution au cours des dernières heures avec, pour une demi-douzaine de critères : niveau chiffré, appréciation si c'est bon, acceptable ou mauvais, commentaires sur les sources et les effets de chacune de ces pollutions.
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samedi 13 septembre 2008

Sevilla

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Après Cordoue, Séville
Au 11ème siècle, la puissance du califat de Cordoba commence à décliner. Sevilla qui en dépendait se met à son compte. Elle connaît alors un grand rayonnement culturel. Après une période almoravide sur la première moitié du 12ème siècle, c'est une période almohade d'un siècle, en attendant la Reconquista dont la date coïncide plus ou moins avec celle de Cordoba.
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Des Almoravides aux Almohades
Les Almoravides sont une dynastie berbère, venue de Mauritanie, qui s'empare du Maroc, y fonde Marrakech vers 1070, étend son emprise sur l'ensemble du Maghreb puis sur le sud de la péninsule ibérique vers 1100 (dont Cordoue, Séville, Valence). Les Almohades, en provenance des mêmes régions, s'opposent à eux et prennent leur place un demi-siècle à un siècle plus tard. Ils en seront éliminés - au nord de l'Afrique comme au sud de l'Espagne – vers le milieu du 13ème siècle.
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L'âge d'or de Séville
Mais c'est de la fin du 15ème siècle que débute l'âge d'or de Séville. La ville a le monopole du commerce avec l'Amérique qui vient d'être découverte : c'est de là que partent les expéditions. Même si elle est un édifice défensif datant des Almohades, même si on insiste pour dire son nom viendrait des reflets dorés dans le Guadalquivir des azulejos qui en recouvraient la façade, la Torre del Oro, à deux pas de l'Alcazar et de la cathédrale, n'en est pas moins devenu un entrepôt d'or.
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La Giralda
Bâtie à l'emplacement de l'ancienne mosquée, la cathédrale ne cède en dimension qu'à Saint-Pierre du Vatican et à Saint-Paul de Londres - qui n'ont d'ailleurs été respectivement achevées qu'un et deux siècles plus tard. Le clocher qui n'est autre que l'ancien minaret, sur le modèle de la Koutoubia de Marrakech, a été couronné par une statue de 4 mètres, symbolisant la Foi... mais qui fait aussi office de girouette (d'où son nom bien connu de Giralda, de «girar» : tourner, girouette se disant «veleta»). Que l'orientation que prend la Foi soit tributaire du sens dans lequel souffle le vent me plonge dans une profonde rêverie métaphysique...
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Don Juan
Plus terre à terre - et pourtant ! - dans le charmant barrio (quartier) de Santa-Cruz qui jouxte la cathédrale et l'Alcazar, plaza de los Refinadores, se dresse la statue de don Juan. Raffinement suprême, on y vient en pèlerinage, ainsi qu'en témoigne la photo du groupe d'italiennes qui illustre cet article, sagement avides des explications de leur guide, près de trois-quarts d'heure durant.
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Le parc Maria-Luisa
Tout près de l'immense Plaza d’España, le parc romantique Maria-Luisa est un havre de fraîcheur et de repos. L'Infante Maria-Luisa (fille du roi d'Espagne) qui vécut au 19ème siècle, en fit don à la ville. On apprend qu'elle était duchesse de Montpensier. Pourquoi ? Elle avait épousé Antoine d'Orléans, dernier fils de Louis-Philippe et duc de Montpensier.
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Séville à vélo
A Séville, le parisien se sent en pays de connaissance quand il aperçoit une ligne de tramway semblable à celle qui, près de chez lui, emprunte le boulevard des Maréchaux. Ou quand son œil est attiré par des emplacements pour vélos en location : les bornes d'attache et la borne informatique sont les mêmes - à la couleur, au nom… et aux tarifs près (2 ou 3 fois moins cher), c'est le Vélib lancé en 2007 à Paris. Pas étonnant quand on apprend que Decaux est derrière cette affaire. On l'appelle Sevici - sorte de contraction de Sevilla et ciclismo : rien à voir avec sévices (on utiliserait plutôt malos tratos - de même, sévir se dit castigar). Le nombre de stations semble être dans les 200 ou 300.
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Ronda
De Séville à Grenade, nous avons fait le crochet par Ronda, petite ville de longue tradition taurine. Une des principales attractions est son Puente Nuevo qui donne sur un profond précipice - le tajo. Ce mot veut dit l'entaille... et non le Tage, le plus grand fleuve de la péninsule, qui passe par Tolède et va se jeter dans l'Atlantique, à Lisbonne. Dans Les Amants du Tage – film de Verneuil d'après un roman de Kessel – Daniel Gélin et Françoise Arnoul ne se jettent pas dans le vide du haut du Puente Nuevo de Ronda.
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vendredi 12 septembre 2008

Cordoba

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Calor...
Vous passerez par Cordoue ? Vous allez y cuire : la température y est à peine tenable. Nous avons tenu... et, dans les petites ruelles ombragées autour de la mosquée - quartier où nous avions trouvé notre point d'hébergement - nous avons sans doute mieux respiré que dans une ville comme Séville, pourtant largement ouverte.
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Un peu d'histoire
Ville d'où suinte l'histoire. Splendide capitale du sud de la péninsule du temps de l'Empire : les soldats romains y recevaient des terres et épousaient des autochtones. C'est à Cordoue que sont nés Sénèque père (le rhéteur) et Sénèque fils (le philosophe). Mais les fouilles n'ont guère permis de dégager qu'un temple, un mausolée, un pont… Conquise par les Arabes au début du 8ème siècle, elle devient la capitale d'un émirat puis d'un califat totalement indépendant de Bagdad, un centre de rayonnement culturel, artistique, économique et politique en Occident. Son développement s'appuie notamment sur l'enrichissement mutuel des cultures chrétienne, juive et musulmane, que favorise une politique de tolérance. Université, bibliothèques, une multiplicité de mosquées : la ville aurait alors abrité autant, sinon plus d'habitants qu'il n'y en a actuellement.

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La mosquée
Agrandie en plusieurs étapes, « la » mosquée (mezquita), à laquelle on accède en passant par le patio des orangers, est - chacun le sait - un chef-d'œuvre de l'art musulman. Lorsque, bien après la Reconquête catholique (à Cordoba, la Reconquista date du début du 13ème siècle), il fut décidé d'élever une cathédrale qui occupe et surmonte la partie centrale de la mosquée, Charles-Quint se serait écrié : Vous avez détruit ce que l'on ne voit nulle part pour construire ce que l'on voit partout.

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Carrefour de cultures
La Reconquista fut précédée par une période de luttes intestines puis de déclin. C'est néanmoins au 12ème siècle que le commentaire de l'œuvre d'Aristote par le musulman Averroès exerce une influence considérable sur le monde occidental. De même, la tentative entreprise par le juif Maimonide pour réconcilier foi et raison, dépasse les cercles juifs pour, entre autres, toucher saint Thomas d'Aquin, voire se prolonger au siècle des Lumières. A Cordoue, les statues de Sénèque, Averroès et Maimonide sont distantes de 300 mètres au plus les unes des autres. Cordoba s'affiche en vue de devenir capitale européenne de la culture en 2016.

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Le Christ aux lanternes
Vers le nord, la plaza de los Capuchinos blanche et pratiquement vide : sentiment de solitude et d'abandon qui entoure le Cristo de los Faroles. Et pourtant des bougies allumées, des fleurs.
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Déclic pour Selenia : la similitude avec cet article écrit en Bretagne à la fin du 19ème siècle et extirpé des chroniques de Gabriela Zapolska – femme de lettres, journaliste et actrice polonaise. Une Itron Varia ar Porzou (Notre-Dame des Portes), humble objet de dévotion des pauvres femmes de Chateauneuf-du-Faou, leur échappe et devient pôle de pélerinage à vocation notamment commerciale. Astiquée, re-peinturlurée, elle est mise derrière une grille dans une chapelle toute neuve que haut-clergé et notabilités inaugurent en grande pompe (voir La Procession, tableau de Paul Sérusier dont Zapolska était alors la compagne).
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Ici, permanence d'une dévotion populaire, en même temps qu'endroit signalé sur les guides touristiques (une étoile : intéressant).
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jeudi 11 septembre 2008

Escapade en Espagne

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L'Andalousie d'abord
Cela faisait de longs mois que des amis valenciens insistaient pour nous recevoir. Nous nous sommes décidés pour début septembre, après un prélude andalou en trois étapes : Cordoba, Sevilla, Granada.
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Au bon moment
La saison était propice – non que les températures aient commencé de décliner… que non ! Mais, quelques semaines auparavant, Selenia s'était fait un plaisir de parcourir l'exposition au Petit Palais, La nuit espagnole : le flamenco, avant-garde et culture populaire 1865-1936. De plus, la période des congés venait de s'achever et le flux de ceux qui optent pour une saison plus clémente restait encore relativement ténu. A la limite, une Espagne plus espagnole qu'envahie par les touristes.

Le taureau d'Osborne
Circuit effectué en voiture. Une des attractions, le long du parcours : le taureau d'Osborne qui surgit au détour d'un virage et dresse sa stature imposante (jusqu'à 14 mètres de haut) sur fond de ciel ibérique. Voici un demi-siècle qu'on peut l'admirer. Il a fait l'objet de démêlés judiciaires depuis une vingtaine d'années ; il perdu son label Osborne mais il est presque devenu un symbole national. Élément de biodiversité au dire de ses défenseurs, il doit en rester une petite centaine dont les deux-tiers en Andalousie, dans les deux Castille et dans la région de Valencia. Coup de pied de l'âne catalan, on n'en trouve plus trace au pays de Gaudi de Miro et de Dali.
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