mercredi 29 décembre 2010

A fin 2010 – Finance

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Ce billet résulte d’une relecture de ce qui a été publié au cours du second semestre 2010 dans le blog Démystifier la finance : Éthique et marchés de Georges Ugeux. En ce sens, il fait suite à des billets similaires portant sur l’année 2009 (daté du 28 décembre) puis sur le 1er semestre 2010 (daté du 20 juin). La sélection pourra paraître arbitraire et le compactage – pour rester dans un volume acceptable – en donne parfois une vision déformée : revenir si besoin aux textes originaux :http://finance.blog.lemonde.fr/

08 VII – Les États-Unis pris à la gorge par la dette publique ?Cette dette a atteint 12 mille milliards de dollars : l’Europe n’est seule… et le Japon ne se porte pas mieux. En outre, celle des différents États qui supportent désormais des dépenses qui revenaient à l’Etat fédéral ont explosé (programmes sociaux, médicaux et éducatifs)… alors que les recettes fiscales ne sont pas à la hausse.

Nous n’avons pas encore vu cette explosion car le taux des obligations de l’Etat fédéral est très faible. Si les coûts de financement augmentaient des questions sérieuses se poseraient. Inquiétude d’autant plus grande que de nombreuses obligations de ce type sont dans les mains des particuliers. De plus, le déficit des pensions – estimé entre un et trois mille milliards de dollars pour les employés locaux – ne s’atténuera que si les marchés boursiers s’améliorent.

Pour éviter une gigantesque déconfiture des finances publiques à travers le monde, l’alternative est entre rigueur et croissance – c’est un choix presque impossible : il faut faire les deux, en évitant que des budgets réduits ne mettent le consommateur en difficulté. Les États-Unis ne diminueront pas leurs dépenses de santé, d’éducation et militaire (80% du budget fédéral). Pour les Européens, pas de relance et austérité.

23 VII – Les agences de notation : de l’arrogance à la démissionCes agences donnent notent le crédit qu’on peut faire à des entreprises (ou à des pays) qui viennent emprunter sur les marchés. L’oligopole qu’elles forment entre elles et la légèreté de leurs explications les font souvent taxer d’arrogance.

Avec la récente réglementation, la SEC voit ses pouvoirs renforcés et les agences devront rendre compte à ceux (les investisseurs notamment) que leurs avis ont lésés. Leurs actionnaires ayant pris peur, les agences de notation se sont mises en grève. Elles ont ainsi fait démonstration de leurs faiblesses structurelles : si l’arrogance est une arme de faibles, la démission (ici la grève) l’est également.

Quant à la notation des risques souverains (concernant les États), la Chine vient de lancer une agence qui vient de publier les siennes. Elle y a une note supérieure aux États-Unis, à la France ou à la Grande-Bretagne, dont la croissance économique et leurs recettes fiscales sont insuffisantes face à la croissance de leur dette. La cause de la crise financière mondiale et de la crise de la dette en Europe provient de ce que le système actuel de notation international ne prend pas suffisamment en compte la capacité de remboursement des États.

26 VII – Quel stress bancaire l’Europe a-t-elle testé ?
Selon nos dirigeants, on a testé la santé des banques européennes dans son ensemble et il n’y a pas de doute sur celle-ci. L’Europe a cependant refusé de tester le cas de la faillite d’un État Membre ou de la restructuration importante de sa dette. Avec un fonds de 750 milliards d’euros, on essaie de faire croire que les dettes du secteur public européen pourront à tout moment être comblées. Malheureusement, les dettes du secteur public de l’UE atteignent plus de 10 mille milliards. Et aucune vraie récession n’a été testée.

Suite à quoi, la valeur des actions des grandes banques espagnoles a augmenté et les autres banques européennes n’ont pas réagi. Rien de semblable au choc qu’avaient provoqué les stress tests américains : leur publication avait littéralement retourné le marché ; depuis, des recapitalisations ont été réalisées. Intermédiaires quasi-exclusifs des financements, les banques européennes empruntent sur les marchés 15 000 milliards d’euros, alors qu’aux États-Unis, elles ne représentent que 25% des actifs financiers.

21 X – Les lycéens n’auront probablement pas de retraite du tout !
Vous vous trompez de combat. Les vieux ne veulent pas travailler quelques années de plus pour compenser en partie un héritage lamentable : pour chacun d’entre vous (dans tous les pays européens), la dette spectaculaire qui vous est transmise a doublé depuis le début de ce siècle.

Et nous allons continuer à presser le citron pour nous payer nos retraites. Nous en sommes à un système où les cotisations des jeunes ne sont pas capitalisées : elles sont immédiatement distribuées aux retraités. A l’âge de votre retraite, un État sans moyens de payer votre pension devra la réduire à une peau de chagrin… et, en plus, vous la taxer.

Vous avez raison de vous battre pour votre avenir. L’allongement de l’âge de la retraite est pour vous, paradoxalement, une bonne nouvelle. Si vous voulez éviter d’être démunis à l’âge de la retraite (quel qu’il soit), forcez dès maintenant le débat de la remise en état de ce régime. Les Canadiens et les Chiliens y sont arrivés : cela a mis vingt ans,

08 XI – Le pari de la Fed menace l’économie mondialeLa Federal Reserve vient de proposer d’injecter 600 milliards de dollars dans l’économie sous forme de rachats aux investisseurs de Bons du Trésor américain. Pour tous les avantages que les États-Unis retirent de leur position dominante, ils ont des devoirs. De Pékin à Brasilia, cette mesure a été critiquée comme menaçant l’économie mondiale.

Son impact immédiat va être une baisse du dollar et le maintien des taux d’intérêt américains à un niveau indécemment bas (ils ne couvrent plus la prime de risque que les investisseurs exigent ailleurs d’un pays surendetté). Les entreprises voudront-elles se financer à ces taux avantageux ? Pas sûr car le secteur n’est pas emprunteur net pour le moment : il émet des obligations et rembourse les banques. L’économie pourrait ne pas être stimulée du tout.

15 XII – Obama a-t-il perdu le contrôle des États-Unis?
Les élections de novembre qui ont donné la majorité de la Chambre des Représentants aux Républicains, mais laissé le contrôle du Sénat aux Démocrates.
Soins de santé – Les Républicains avaient initialement perdu la partie ; ils tentent d’utiliser les Tribunaux pour faire échec à une disposition clé.
Taxation – Les Républicains qui voulaient que la réduction d’impôts de G. W. Bush soit effective pour tous les contribuables. Obama a capitulé : remous dans les rangs démocrates qui crient à la trahison.
Économie – Face aux mesures décidées par la Fed, la Maison Blanche n’a pas d’experts capables de comprendre que les conséquences sont pires que le mal.
Dollar – Il se retrouve en position de faiblesse (si l’Europe n’était pas elle-même malade, l’Euro serait à plus d’1,5 dollar). Une telle irresponsabilité renforce l’attitude de la Chine à ne pas réévaluer sa devise et crée des distorsions importantes au sein de l’Asie.

17 XII – L’Europe menacée par la cacophonie de ses dirigeantsAu milieu de l’inquiétude créée par la situation des finances publiques de l’Eurozone, il est important de communiquer peu, mais de communiquer bien. Angela Merkel est considérée comme la seule chance de sauvetage de l’Eurozone. J’ai une certaine sympathie pour sa position impossible, mais parfois le silence est d’or.

Elle a annoncé que le secteur privé participerait au refinancement des déficits publics à partir de 2013 : les obligations européennes sont tombées en vrille. La Banque européenne d’investissement (BEI) subit ses déclarations à travers les fluctuations des obligations, notées AAA, qui financent les projets de l’Union Européenne. L’Europe a approuvé une idée inutile : modifier le Traité de Lisbonne – cela va durer au moins trois ans et risque de ne jamais se produire.

Chaque chef d’Etat, de Gouvernement ou Ministre des Finances s’adresse d’abord à son électorat national. Derrière cette attitude se profile l’absence de conscience des répercussions de ces déclarations au-delà du pays d’origine.

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24 XII – Noël dans la tempête reste NoëlNoël est un bon moment pour reposer quelques questions fondamentales :
Corruption – Elle ne touche pas seulement l’Inde, la Russie ou la Chine. Elle existe également dans nos pays (Bettencourt, Karachi, Berlusconi).
Monde politique – Rarement il a été aussi peu crédible. L’Europe n’a pas de leader : elle est devenue une bureaucratie et une forme de souk où les compromis tiennent plus souvent de la compromission. Et pourtant, elle continue à progresser à petit pas.
L’Église catholique a concentré sa morale, non sur le message spirituel de l’Évangile, mais sur la sexualité. Et pourtant, il y a dans son sein des œuvres incroyablement généreuses.
Nous avons largement dépassé nos moyens et hypothéqué l’avenir de nos enfants et petits-enfants (hypothèque est financière ; signes avant-coureurs de la diminution des capacités pétrolières ; planète qui, à certains endroits, ressemble à une poubelle).

Ce ne sont pas les difficultés qui nous menacent : c’est notre réponse aux défis sur le long terme. La réponse n’est pas chez les autres : elle est en nous et chez nous.

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