samedi 6 août 2011

A mi-2011 - Presse


Lors de revues semestrielles précédentes, il avait été exclusivement fait appel à des articles du quotidien Le Temps, qui paraît en suisse romande. L’éventail s’est ci un peu élargi – d’une part parce que certains articles de ce quotidien ont déjà été mis à contribution au cours des six derniers mois ; d’autre part, grâce à des articles d’autres provenances. Le premier provient de The Lancet, le second du Monde et les trois derniers du Temps. Tous datent de janvier ou février. La sélection pourra paraître arbitraire et le compactage – pour rester dans un volume acceptable – en donne parfois une vision déformée : pour revenir si besoin aux textes originaux, utiliser les adresses de sites mentionnées.

Obésité et maigreur
On trouve sur le site de The Lancet les principales conclusions d’une étude internationale sur l’IMC – l’indice de masse corporelle. Les évolutions observées vont de 1980 à 2008 et les statistiques portent sur plus de 9 millions de personnes de 20 ans et plus.

L’IMC est considéré comme un des indicateurs les plus pertinents dans ce domaine. Il se calcule en divisant le poids (en kg) par le carré de la taille de l’individu (en mètre). Exemple : vous pesez 72kg et vous mesurez 1,73 mètre – votre IMC est de 70 / (1,73 x 1,73) = 24… votre corpulence est considérée comme normale. Mais si votre IMC dépasse 25 (ici 75 kg pour 1,73 m) ce serait un début de l’obésité et, à 30 (90kg) ce serait de l’obésité ; à l’inverse, au-dessous de 18,5 (dans les 55 kg) cela deviendrait de la maigreur et, à 16,5 (50 kg) de la dénutrition. On considère qu’une bonne moitié des Français sont dans la zone normale, que 30% sont en surpoids et plus de 10% obèses ou très obèses – les maigres ne sont que 5%.

Au niveau mondial, on observe une croissance d’environ un demi-point par décennie. En 2008, environ 25% de la population mondiale adulte était en surpoids (IMC entre 25 et 30) et 20% obèse ou très obèse (plus de 30). Parmi les pays développés, c’étaient les États-Unis qui avaient le plus fort IMC moyen. Sinon, dans certains pays d’Océanie, l’IMC moyen dépassait les 34, alors qu’il tournait autour de 20 dans plusieurs pays de l’Afrique sub-saharienne et du Sud-est asiatique.

The Lancet est un hebdomadaire médical britannique de renommée mondiale, créé en 1823.
L’étude a été subventionnée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et par la Fondation Bill & Melinda Gates (Bill Gates est à l’origine de Microsoft).

Fortune des ex-dirigeants tunisiens
Dans une infographie, Le Monde cherche à donner une idée de la fortune qui avait été rassemblée entre les mains du chef d’État tunisien déchu, Ben Ali et par ses proches. Les personnes mentionnées sont dans sa propre famille, les descendants qu’il a eu des sa première femme, sa seconde femme, la famille de celle-ci et les descendants qu’il a eus avec elle.

Les cinq frères et sœurs de Ben Ali ont privilégié : l’immobilier, l’hôtellerie et les parcs d’attraction ; le secteur aérien (Karthago Airlines, Tunisair) et l’aéroportuaire ; les télécommunications ; l’ameublement ; l’import-export (voitures, métaux, vêtements) ; et une présence dans les cercles du pouvoir.

Pour les trois filles de la première épouse (et les gendres respectifs), c’étaient plutôt des matériaux (céramique, plastique), des services bancaires et financiers (dont la Banque nationale de Tunisie), la grande distribution (dont Carrefour et Monoprix), l’informatique, Internet et les télécommunications (dont Orange), l’aéroportuaire, l’alimentation, l’importation (dont Mercédès et Fiat) et le comité national olympique.

On prête à la seconde femme un rôle d’éminence grise qui l’aurait conduite à installer sa famille à la tête d’une immense fortune, en partie grâce à des situations de monopole :

. Deux de ses filles notamment (et les gendres), aves la concession automobile (dont Volkswagen, Audi, Porsche, Seat, Kia, Peugeot), les médias, les télécommunications, l’immobilier et l’agriculture.

. La famille Trabelsi dont elle est originaire : secteurs bancaire (dont Banque de Tunisie), Aviation (dont Karthago Airlines), radio et télévision, transport pétrolier, production industrielle, promotion et construction immobilière, tourisme et hôtellerie, importation alimentaire.

Qu’est-ce au juste qu’une maladie ?
Tel est le titre d’un article, signé par Lucia Sillig et paru dans Le Temps, où les considérations médicales et de solidarité se confrontent à une certaine philosophie économique propre au secteur de l’assurance. Point de départ : les problèmes de vue sont liés à des défauts génétiques ou au vieillissement – ils ne sont donc pas des maladies. Conséquence : à partir de cette année, les lunettes ne seront plus remboursées par l’assurance maladie.

Définition difficile : entre la santé vue par l’OMS comme un parfait bien-être physique, mental et social… et la maladie, le curseur relève rapidement du social et du politique. Exclure de l’assurance de base les troubles de la vue au nom du génétique ou du vieillissement, laisse entrevoir que le couperet pourrait bientôt tomber sur d’autres handicaps, actuellement couverts par cette même assurance.

Et ce à une époque où le champ du pathologique a tendance à s’élargir. Il y en a qui estiment qu’avec l’effritement des grandes religions (on demandait la vie éternelle), la santé, dont les médecins sont les grands prêtres, est venue en prendre la place (une vie la plus longue possible). Mais si personne ne conteste que les maladies infectieuses, venues du dehors, sont de vraies pathologies (épidémies que l’on contient de mieux en mieux)… en matière de religion, une dose suffisante de culpabilisation ne dépare pas trop s’il s’agit de maladies qui viennent du dedans de soi-même.

Face à cela il y a, par exemple, le lobby pharmaceutique qui a réussi à faire rembourser les médicaments pour prévenir l’hypertension ou le cholestérol – alors que l’exercice physique est tout aussi efficace. Et dans certains cas – question de remboursement mise à part – il ne s’agit plus de rétablir une norme mais de la dépasser (ex. : Viagra).

D’un point de vue économique, la part prise par la santé dans les budgets (des particuliers ou au niveau national : PIB) a commencé de poser problème dans plus d’un pays. A vouloir contenir le volume des prestations remboursées, on va aisément vers une assurance à la carte qui signe la fin de la solidarité. Et qui dit fin de la solidarité dit source de violence (bonne question... à creuser), estiment ceux pour qui parvenir à s’entendre sur ce qui est important et ce sur quoi on ne se désolidarise pas, est un des enjeux majeurs du futur.

La photo : évolution des usages
Dans Le Temps, encore : Caroline Stevan nous voit Tous photomaniaques. A cause du numérique, bien sûr.

A l’époque des bobines 36 poses, les européens prenaient une centaine de photos par an, à tirer sur papier. Avec le numérique, ce serait cinq fois plus. Une récente étude Ipsos, concernant les Français, donne un chiffre encore plus important – si on met de côté les appareils perfectionnés (reflex…), les ¾ avec un compact et le reste avec un téléphone portable.

Mais une bonne partie de ces clichés sont simplement visionnés sur l’écran de l’appareil avec lequel on les a pris et ne vont guère au-delà. Il y a des gens qui ne savent pas comment vider leur carte mémoire ou qui n’ont pas d’ordinateur, indique-t-on dans des magasins de photographie. On les aide à choisir les plus importants pour le tirage sur papier. Cela étant, 60% des tirages se fait par commande en ligne, via Internet.

Il y a trois âges typiques pour prendre des photos : l’adolescence, où c’est un moyen récréatif et d’échanges ; l’arrivée du premier enfant et le suivi de son évolution ; la venue des petits-enfants. S’y ajoutent les vacances, les anniversaires et les fêtes de fin d’année.

Tendance lourde – puisqu’elle pourrait bien supplanter en chiffre d’affaires le tirage sur papier : les albums – ils organisent une mise en scène de vie et deviennent un cadeau apprécié, sous forme également de calendriers ou de cartes de vœux. Indétrônable parmi les albums que l’on conserve soigneusement – et habituellement confié à un professionnel – l’album du mariage.

Est-ce tout ? Que non ! Bien des usages particuliers se mettent à fleurir. Par exemple : photographier ce qu’il faut réapprovisionner plutôt que de faire une liste des courses ; ou le compteur de la pompe à essence pour suivre la consommation et ce qu’elle coûte ; ou le numéro de place dans le parking souterrain ; ou des tas de petits évènements personnels ou matériels de la vie courante (faites donc un tour des illustrations de blogs pour en avoir une idée).

Pour ne pas mourir statistiquement idiot
Je me souviens de visites, il y a quelques années à une maison de retraite. En parcourant les couloirs, les noms sur les portes des chambres ne laissaient pas de doute : une vingtaine de femmes pour un homme... A y réfléchir, pas trop étonnant : avec une espérance de vie de 7 ans supérieure et généralement mariée à 3 ans plus vieux qu’elles, la probabilité globale d’être veuve l’emportait sur la situation inverse.

Probabilité globale fondée sur des statistiques ne veut pas dire certitude dans chaque cas particulier. Et mon alter-égale n’a pas tort de le faire remarquer quand j’aborde ce sujet. Elle a pour le moins la charité de ne point aveuglément prêter foi en l’espérance (de vie).

Dans Le Temps, toujours, mais dans un autre registre, Daniel Saraga, attire notre attention sur quelques dangers liés à l’interprétation des statistiques, sous le titre : Prédire le futur : probablement possible ?

Le point de départ est une expérience à laquelle 1000 volontaires ont participé : on leur montre une photo ; il y a aussi – mais cette fois-ci masquée – une reproduction de cette photo, qui peut se trouver à droite ou à gauche d’une feuille ; on leur demande de deviner si ce sera à droite ou à gauche. Résultat : quand c’est une photo banale, ils trouvent (ou se trompent) une fois sur deux (50-50) ; quand c’est une photo érotique, c’est du 53-47. Conclusion habituelle : comme, avec autant de sujets (1000), on a dépassé le 51-49, le résultat est considéré comme significatif – autrement dit, la précognition existe.

Pour de nombreux journalistes et même des scientifiques, cela est une preuve. On voit quotidiennement cette attitude dans des articles qui, bien au-delà de la parapsychologie, touchent à l’épidémiologie ou à l’écologie, par exemple.

Le problème est que le calcul qui a été fait s’appelle communément – et de façon impropre – test d’hypothèse. Ce qui laisse croire que la théorie que l’on a faite au départ est juste (ici : les photos érotiques engendrent un phénomène de précognition)… alors que ce test ne fait qu’estimer la vraisemblance que la théorie avancée.

Plutôt que d’accepter sans discernement ledit test d’hypothèse, mieux vaudrait employer la méthode mise au point par le statisticien Thomas Bayes. La conclusion à laquelle on parvient alors est qu’on n'a ici que des débuts de preuve. On débouche sur une invitation à des expériences beaucoup plus poussées pour en avoir le cœur net. D’autant que le test d’hypothèse est particulièrement mal adapté dans les cas où (comme ici) les effets sont très faibles, ainsi que ceux où – comme en psychologie, éducation sociologie, écologie… – interviennent plusieurs facteurs qui s’influencent potentiellement les uns les autres..

A l’emploi inadéquat du test d’hypothèse près, on ne peut pas reprocher à l’étude sur la précognition un manque de transparence, d’honnêteté, de qualité de rédaction, voire de professionnalisme de la part des ceux qui l’on menée. Mais il y a un mais… C'est ce qui est bien le plus perturbant.

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