samedi 29 mai 2010

André Degaine


L’ambiance familiale, à Clermont-Ferrand où il était né en 1926 s’y prêtait : la vie d’André Degaine qui vient de nous quitter a été marquée par la passion du théâtre. Enfant, sa mère lui avait confectionné des marionnettes. Puis il s’était plongé dans les livres. Monté à Paris, il ajoute une autre dimension : au-delà de sa vie professionnelle, il va voir les pièces qui s’y jouent, en fait l’objet d’une correspondance suivie avec son frère, s’engage dans la compagnie du Jeune théâtre des PTT à laquelle il consacre de nombreuses heures de loisir, y joue, met la main à la pâte pour les diverses fonctions qu’il faut y assumer, assure des mises en scène, etc.

Cette disposition pour imaginer et conter est également servie par un goût étonnant pour le dessin. Ce qu’il a amassé prend un jour la forme d’un ouvrage conséquent, entièrement écrit et illustré de sa main : L’histoire du théâtre dessinée, parue chez Nizet, cela fait bientôt une vingtaine d’années. Sans véritable équivalent, bénéficiant d’un bouche à oreille qui ne s’est pas démenti, cet ouvrage a connu une belle diffusion : s’il vous prend, par exemple, d’interroger des responsables des documentations de lycées ou collèges, ou des professeurs de littérature, bien d’entre eux sauront vous dire de quoi il s’agit.

Soucieux de ne pas s’en tenir aux institutions et aux adultes, il s’est lancé par la suite dans une version profondément remaniée : Le théâtre raconté aux jeunes – s’interrogeant à chaque page, tout au long de son élaboration, sur la façon dont il vaudrait mieux le présenter.
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Il aimait également organiser des promenades afin de faire découvrir à ceux qui l’accompagnaient l’histoire du théâtre à Paris et des théâtres parisiens. Il en est sorti un troisième ouvrage, conçu sur les mêmes principes, le Guide des promenades théâtrales à Paris. Lorsque l’on franchissait le seuil de la Boutique de la Comédie Française et que l’on engageait la conversation, on pouvait apprendre qu’André Degaine ne manquait pas, de temps à autre, de venir s’y informer de l’intérêt que l’on portait à ses livres et pour quelles raisons (pour soi-même, pour offrir et à qui, éventuels commentaires ou anecdotes…).

C’est au début des années ’90 qu’il commence à participer à l’émission Le masque et la plume, qui est suivie chaque dimanche par plus d’un demi-million d’auditeurs – mais, très rapidement, il a préféré s’installer parmi les spectateurs, d’où il donnait régulièrement son avis, plutôt qu’à la tribune.

Toujours dans la même veine, il est à l’origine, en 1999, du Théâtre-Club, un peu comme les ciné-clubs s’était-il dit. Les affiches en donnant le programme ? C’était André Degaine qui les avait conçues et réalisées. Accès libre dans une salle mise à disposition par le Société littéraire de la Poste et de France Télécom. Animation confiée à Alain Toutous. Outre une revue de l’actualité théâtrale – où chaque personne présente peut s’exprimer – on y accueille un invité ou discute sur un évènement du moment, et assiste à des extraits significatifs de spectacles en cours. Par la suite, Xavier Jaillard aidant, on en est venu à alterner avec la représentation intégrale de quelques spectacles.

Sa profonde connaissance du sujet a conduit André Degaine à y proposer de façon ramassée, toujours vivante, avec quelques passages joués pour illustrer le propos, une succession d’épisodes pour 25 siècles de théâtre, depuis le théâtre grec et la comédie antique, jusqu’au Théâtre Libre, à Jouvet, à Vilar… en passant par Molière, le Boulevard du crime, Courteline, Dullin, les Pitoëff


Ce billet est illustré par une photo d’André Degaine prise, il y a cinq ans, à Avignon où il se rendait régulièrement – certainement porté par le souvenir de Jean Vilar – et par les couvertures des ouvrages cités.

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