samedi 10 octobre 2015
Dur, dur... la conscience
L’hebdomadaire THE
ECONOMIST propose une section Science & technology de très bon niveau avec, à mon sens, deux péchés mignons –
pascalien et darwinien :
Dans
le premier cas, la Pensée 199 semble les taquiner, vu l’intérêt qui s’y
manifeste pour l’infiniment petit et l’infiniment grand.
Quant
à l’explication évolutionniste, on va en avoir un exemple dans quelques lignes.
Le
magazine vient de faire le tour de six mystères scientifiques non
résolus :
Comment la vie a-t-elle commencé ? L’univers est-il le
seul ? De quoi cet univers est-il fait ? Qu’est-ce qui a causé le
développement explosif du Cambrien ? Pourquoi le temps s’écoule-t-il ?
Qu’est-ce que la conscience ?
C’est ce dernier article
que je tente d’adapter en le condensant ici, de 12 000 à 3 500
caractères – espacements compris.
Il n’y a pas
moyen de mesurer la conscience. Pas drôle pour les scientifiques.
On est dans
le subjectif : un être conscient sait qu’il l’est. Mais les autres ?
Des zombies
programmés pour en donner l’apparence ? (On
n’est pas près loin des robots à épouser d’il y a 15 jours).
Conviction
partagée : les autres humains sont eux aussi conscients. Mais il existe
des situations assez troublantes.
Parlons du cerveau.
Le sommeil, déjà : on n’est pas conscient quand on dort ;
pourtant le cerveau est souvent aussi actif qu’éveillé.
Il y a la vue aveugle (ne pas confondre avec Eyes
wide shut de Stanley Kubrick).
C’est
quand les yeux et les nerfs optiques fonctionnent, pas le cortex visuel :
le patient n’a pas conscience de voir et pourtant, son regard se porte sur des
objets et il les saisit.
À l’inverse, une personne née
sans cervelet (qui permet la coordination des mouvements) avait grand
mal à se déplacer mais pouvait très bien décrire ce qu’elle éprouvait.
Et il y a le claustrum (en fait, un dans chaque hémisphère), fine couche logée
derrière le cortex et en relation dans les deux sens avec toutes les parties de
celui-ci.
Avec
des électrodes plantées à proximité : on fait passer du courant – le sujet
n’est plus conscient ; on l’interrompt : la conscience revient.
Et les ondes gamma à 40 Hz qui
semblent synchroniser les différentes parties du cerveau – tout comme la
cadence d’horloge dans un ordinateur.
Ces
ondes se renforcent quand on se concentre sur une tâche, sont toujours là tant
qu’on est conscient, et sont presque en veilleuse quand on dort (sauf pendant
les rêves).
Venons-en au carrefour temporo-pariétal. On peut le désactiver provisoirement par stimulation
magnétique :
Ce
qui favorise une conscience de la perception d’être en dehors de son propre
corps ; ce qui réduit en même temps la capacité de reconnaître que
d’autres créatures ont eux aussi un esprit.
Ici, la petite récréation
darwinienne annoncée : avoir, au cours de l’évolution, accédé à
cette conscience de l’état d’esprit des autres, a l’avantage, pour ceux qui en
sont pourvus, de pouvoir en modéliser le comportement
et ainsi de l’anticiper. Cerise sur le gâteau : … et même d’être conscient
que l’on est soi-même conscient… (Il en a qui s’exclament : CQFD).
Stade suivant : celui du miroir – on sort de considérations
sur le cerveau proprement dit pour s’intéresser aux autres espèces.
Ce qu’on
vient d’évoquer (ça s’appelle la théorie de l’esprit) implique qu’on devrait pouvoir se
reconnaître dans un miroir.
Pour les tout jeunes
enfants humains, ça se passe vers 18 mois.
Les études sur différentes
sortes d’animaux ont plus ou moins conclu :
Que
ça marcherait pour les bonobos, les orangs outangs, les éléphants, les dauphins
et les pies…
Mais
pas avec les gorilles (poser la question à Catherine Deneuve à propos de Kiko
Mirales), les gibbons, les singes, les chiens ou les pigeons.
Néanmoins l’odorat est plus important que la vision chez
les chiens : est-ce qu’une organisation différente du cerveau ne
permettrait pas une auto-reconnaissance autour de cette faculté ?
Autre façon d’aborder ce thème : est-ce que les
chauves-souris ne disposeraient pas de l’équivalent autour d’une localisation,
non pas par la vision mais les échos sonores ?
Bon – même
si on identifie des corrélations entre l’aspect neurologique et la conscience,
même si on y repère du pourquoi et du comment…
Tout ce qui
précède n’apporte pas vraiment de réponse à ce qu’elle est.
Dur, dur…
c’est le hard problem, le problème difficile, peut-être le problème impossible de la
conscience.
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