Ceci est le condensé d'une présentation faite par Klaus SCHWAB -initiateur du FORUM DE DAVOS- pour le quotidien de Suisse romande LE TEMPS.
Il vient de publier un ouvrage intitulé La quatrième révolution industrielle, l’un des thèmes de cette 46ème édition du Forum.
Il vient de publier un ouvrage intitulé La quatrième révolution industrielle, l’un des thèmes de cette 46ème édition du Forum.
Selon lui, les quatre révolutions sont celles qui, à partir de l'ère de l'Agriculture, nous ont fait passer à celles :
Du début de l'industrie (charbon-sidérurgie-textile).
Du déploiement industriel (pétrole-électricité-automobile-chimie).
De l'informatique et des services.
De l'Internet et de la robotisation.
Cette année, nous aurons une croissance modeste, autour de 3%.
Cela se compare avec une croissance
mondiale de plus de 5% avant la crise de 2008. La différence entre 3 et 5% est
considérable.
Si cet écart se prolonge, cela signifie
que le PIB mondial double seulement tous les 24 ans, contre tous les 14 à
15 ans auparavant.
Cela aura des impacts significatifs en
termes de créations d’emplois et de capacité à surmonter l’exclusion sociale.
Il faut rendre l’humanité attentive aux
grands bouleversements que la quatrième révolution industrielle va provoquer.
Désormais c’est un tsunami. Tout cela va
bouleverser notre société dans ses fondements.
Cette nouvelle révolution industrielle
aura un impact énorme sur le marché du travail.
Cela ne va pas tuer tout le travail mais
certains jobs, notamment ceux qui sont dans le domaine de l’intermédiation.
Par exemple, dans le secteur
administratif, les employés de bureau du secteur bancaire et de
l’administration en général.
Comme lors des trois premières révolutions industrielles, une grande partie
des emplois qui sont détruits seront remplacés par de nouveaux.
Nous ne pouvons pas encore tous les
imaginer.
Lors des premières révolutions
industrielles, la main-d’œuvre a été transférée de l’agriculture, lors de la 3ème
de l’industrie aux services.
Désormais, ce sera une concentration des
emplois dans le domaine de la santé, de l’éducation et du social.
Avec le vieillissement de la population
et l’augmentation des cas sociaux, des opportunités de travail vont se créer.
J’ajoute à cela le secteur
culturel : on verra augmenter la capacité d’innovation, de création et
cela ne va pas se concentrer seulement sur le plan technologique.
Je ne m’imagine pas une guerre mondiale, mais nous aurons toujours plus de
conflits régionaux qui augmentent l’insécurité du monde en général.
Cela va créer des flux de réfugiés. Les
guerres ne sont jamais localisées très longtemps. Ce que nous avons vu à Paris
n’est pas un événement isolé.
Dans le passé il fallait de grandes
armées pour faire des dégâts. Aujourd’hui, un seul individu peut causer
d’énormes dommages et même rester anonyme.
Prenez le cas des cyber-attaques
susceptibles de bloquer toutes les infrastructures d’un pays.
L’activité économique a besoin d’un haut
degré de sécurité et celle-ci a son prix. Ce prix va augmenter et il se
reflétera dans les coûts.
J’imagine principalement trois risques : conflits régionaux,
cyber-attaques de grande ampleur, et les chocs dans tout le système monétaire
et fiscal car le monde est encore surendetté.
J’estime la dette mondiale à
200 mille milliards de dollars. C’est bien sûr énorme, et il faudra trouver une
solution.
Si on injecte de la monnaie sans aucune
limite dans l’économie au prix de zéro (exemple aux États-Unis), nous
dénaturons la structure même de l’économie.
Il faut sortir de cette spirale en
redonnant un prix au capital.
La Chine ne va pas décliner.
Ce sera une grande puissance à long
terme.
En termes de pouvoir d’achat, son PIB
est presque équivalent à celui des États-Unis.
Il y a une marge de progression. Mais la
croissance va se réduire.
L’Europe est au niveau des États-Unis dans bien des secteurs. Mais
l’important, c’est sa capacité à se renouveler.
La concurrence dans la quatrième
révolution industrielle va se faire sur la base de la créativité et de
l’innovation, ce qui demande une grande capacité d’accès aux talents.
Et là les Etats-Unis gardent un avantage
indéniable, avec un pool de talents entrepreneuriaux beaucoup plus grand car un
échec là-bas ne vous poursuit pas toute votre vie.
Toute ma génération après la guerre a
pensé que nous ne connaîtrions plus de conflits en Europe.
Pour la génération des politiciens
actuels, la priorité va plutôt à la dimension nationale.
Vous ne pouvez donc plus faire de
compromis qui sont d’abord dans l’intérêt de l’Europe mais pas nécessairement
dans celui de votre pays.
Cela explique le manque de solidarité en
Europe. Or l’intégration est nécessaire : avec ses 500 millions
d’habitants et son poids économique, l’Europe peut jouer un rôle dans le monde.
Mais si elle se disperse, voire se
désintègre, le rôle de chaque pays, même celui de l’Allemagne, va se
marginaliser dans un contexte mondial.
En Europe, nous nous sommes habitués à
un niveau de vie, à un système de sécurité sociale – que je trouve juste.
Mais désormais, sur le plan
technologique, par exemple, nous n’avons pas seulement la concurrence des
États-Unis mais celle de la Chine et de l’Inde et, demain, de multiples autres
pays.
Les Européens doivent être beaucoup plus
conscients que tout ce que nous avons aujourd’hui peut être rapidement perdu si
nous n’évoluons pas assez vite.
On assiste à des super-donations de personnalités qui choisissent de donner
pour une cause. Serait-ce plutôt que de faire confiance à l’Etat
redistributeur ?
Pour Mark ZUCKERBERG ou Bill GATES, la
motivation est différente.
Les deux ont gagné beaucoup d’argent et
ils ont le désir de laisser un certain héritage sur le plan social.
Ils pourraient dépenser leur argent plus
égoïstement.
Bill Gates a certainement sauvé des
millions de vies à travers son œuvre philanthropique.
Ce n’est pas pour éviter l’impôt qu’il
agit ainsi. Cela étant, si le système le permet, ils utilisent cette
possibilité.
Dans la quatrième révolution industrielle vous avez besoin d’une
coopération très étroite entre l’Etat, qui doit fixer les règles, et l’industrie,
moteur du progrès.
Or, nous sommes dans une situation où le
progrès surpasse la capacité de l’Etat de créer les règlements nécessaires.
C’est UBER et AIRBNB, la voiture
autonome, prête d’un point de vue technologique mais à laquelle les autorités
refusent pour le moment le permis de circulation.
Le World Economic Forum de Davos est une organisation qui fait la promotion
de la coopération entre les secteurs public et privé.
Cette année, nous mettrons ensemble 300 personnalités du monde politique
avec 1500 chefs d’entreprise, la société civile, les représentants de la
société civile, les meilleurs spécialistes et les représentants de la jeunesse.
Ma succession est prête. L’institutionnalisation du forum le rend
indépendant à long terme de son fondateur. Nous avons aussi créé un système de
gouvernance qui répond aux exigences d’une organisation internationale.
