dimanche 18 juillet 2010

Avignon 2010 (I)

Ce qui suit fait partie d'une série de plusieurs billets sur le festival d'Avignon de juillet 2010.
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Le festival : rappels
En septembre 1947, à la demande du poète René Char, Jean Vilar (1912) donne quelques représentations dans la Cour d’honneur du Palais des papes, aménagée à cet effet, à l’occasion d’une Semaine d’art dramatique à Avignon – dont Richard II de Shakespeare. Rebelote l’année d’après, puis les suivantes, en juillet. Vilar s’est attaché une troupe de jeunes talents – Gérard Philipe (1922) les rejoindra en 1951. Public de plus en plus nombreux et fidèle, dans la mouvance de l’éducation populaire, avec lectures et débats : c’est un succès. Importante ouverture à partir de 1966 : d’une part le Festival, qui commence à sortir de la Cour d’honneur, accueille des troupes théâtrales autres que le TNP parisien ainsi que de la danse avec Maurice Béjart (1927) ; d’autre part des initiatives externes – ce qui deviendra le OFF – voient le jour.

A la mort de Vilar, en 1971, c’est Paul Puaux (1920), alors administrateur permanent, qui prend la relève à la tête du Festival. Il met fin à cette aventure en 1979. Le Festival devient une association 1901 composé des collectivités publiques qui subventionnent et de personnalités qualifiées. C’est désormais Bernard Faivre d’Arcier (1944) qui va le diriger, jusqu’en 2003 – avec un passage de relais à Alain Crombecque (1939) entre 1985 et 1992. Le Festival s’est entre temps étiré sur un mois, considérablement diversifié au-delà de sa vocation initialement théâtrale, a perdu de sa force emblématique mais reste un rendez-vous incontournable pour la profession. D’autant que le OFF s’est lui-même institutionnalisé à partir de 1982 et qu’il est devenu un marché de la production théâtrale.

En 2003, le Festival est annulé : c’est le résultat du mouvement des intermittents du spectacle. C’est au tour de deux adjoints de Faivre d’Arcier – Hortense Archambault (1970) et Vincent Baudriller (1968) – de prendre la direction d’un Festival relativement affaibli. Ils cherchent à en rajeunir l’esprit et inaugurent la présence à chaque édition d’un ou deux artistes associés… ce qui ne va pas sans polémiques quant aux choix qui en découlent. Ils devraient céder leur place en 2011.

Ambiance – rencontres - découvertes
Grâce à une connaissance qui pouvait nous héberger dans le centre d’Avignon, Selénia m’y avait déjà embarqué, il y a 5 ans et il y a 3 ans. Je sais des personnes qui ont l’intention de ne jamais y mettre les pieds et d’autres qui sont des inconditionnelles du IN (c’est ainsi que l’on appelle souvent le Festival officiel, par opposition au OFF). Sans enthousiasme excessif, y venir de temps à autre m’y plaît pour des raisons différentes : l’ambiance, la stimulation qui émane de certaines rencontres avec le public, et quelques découvertes théâtrales – essentiellement dans le OFF.

Où trouverait-on ailleurs une telle ambiance ?
L’évènement se concentre essentiellement au sein de la partie intra-muros de la ville qui fait un peu plus d’un km². Y résident habituellement une grosse dizaine de milliers d’habitants mais, en ne comptant que les artistes et techniciens du IN et du OFF plus ou moins à demeure en juillet, on approche du doublement… Mais surtout y défilent au cours mois de juillet un bon demi-million de visiteurs-spectateurs. Pour rabattre ceux-ci dans leurs filets (on estime qu’il y a un million d’entrées) les 850 compagnies du OFF ne manquent pas de pratiquer les règles élémentaires du marketing : (1) attirer l’attention ; (2) induire une préférence ; (3) faire une proposition ; (4) verrouiller le contrat… (voir illustration en tête de ce billet).

Des (dizaines de ?) milliers d’affiches, collées sur des cartons d’emballage et attachées avec de la ficelle, s’accrochent partout où c’est possible : aux murs aux lanternes, panneaux de signalisation, descentes de gouttières… Des personnages les plus bariolés vous distribuent en permanence des prospectus au format de cartes postales… ou des sacs en plastique vous invitant à aller voir les Caprices de Marianne au prétexte de vous désencombrer les mains. Devant les terrasses et restaurants en plein air, vous avez droit à de petites récitations, concerts de rue ou sortes de jingles pour vous faire entrer dans le crâne : quoi, où et à quelle heure. Marketing, mais créatif et bon enfant sous le soleil qui tape pourtant – donc ambiance. Où trouveriez-vous cela ailleurs ? Par comparaison, les flots de vacanciers le long des plages atlantiques ou parisiennes prennent des allures de convoi funèbre.

Rencontres avec le public.
S’il n’y a pas trop de bluff dans les chiffres qui circulent, le IN (aux places en moyenne deux fois plus cher) drainerait 6 ou 7 fois moins de spectateurs que le OFF. Il offre 25 fois moins de spectacles et 80 fois moins de représentations, mais le nombre de places y est nettement plus conséquent (ainsi, 2000 places dans la Cour d’honneur). Mais ce qui me plaît le mieux dans le IN, ce sont les rencontres organisées avec le public – soit face à l’équipe artistique d’un des spectacles donnés, soit sur un thème particulier. Il y a aussi des émissions radio en public (genre Le masque et la plume) et des rencontres avec la presse – mais on est alors coincé dans une logique de diffusion top-down. On trouvera dans d’autres billets de ce bloc-notes mon compte rendu de quelques unes de ces manifestations.

Comment s’orienter et choisir un spectacle ?
Tout est permis. Se laisser séduire par une affiche ou par une troupe qui a agrémenté votre café en terrasse par son jingle (parfois admirablement exécuté… mais si ça chante faux, ce n’est pas un bon point pour la qualité artistique de ce qui est proposé). Compulser les 400 pages du catalogue exhaustif. S’en remettre à un guide – certaine édition spéciale d’un journal gratuit vous recommande objectivement environ 250 spectacles). J’ai eu la chance, avec Selénia, d’être en compagnie de qui connaissait la profession et qui, le bouche à oreille aidant, s’est arrangée pour sélectionner à chaque fois quelque chose d’intéressant et de bon niveau. Aucun ne figurait dans les guides consultés (cliquer : ICI)

1 commentaire:

Raoul N a dit…

Ajout a posteriori de l'auteur du bloc-notes : la décision a été prise en novembre 2010 de reconduire, quelques années encore, Hortense Archambault et Vincent Baudriller.